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Source : Bulletin SHAP, tome XXIV (1897), pp. 59-63.

 

LETTRES DE SAUVEGARDE

 données par le roi Henri IV au seigneur de La Douze, du 9 décembre 1590.

De par le Roy

A tous nos lieutenans généraux, gouverneurs de nos provinces, maréchaulx de France, collonels, cappitaines, chefz et conducteurs de noz gens de guerre tant de cheval que de pied, de quelque langue et nation qu'ilz soient, maréchaulx de camp des logis et fourriers, commis et a commettre a faire les départemens de noz ditz gens de guerre et tous aultres qu'il appartiendra ausquels ces présentes seront monstrées, salut.

Désirant gratiffier nostre ame et féal chevalier de nostre ordre le sr de la Douze, nous vous deffendons très expressément sortant que craignez nous desobeyr et desplaire, que en ses maisons, terres et seigneuries de la Douze, Vielleville, Peyramont, Vern, Rilhac et autres aluy appartenans, vous nayez a loger ne promettre logis aucuns de nos ditz gens de guerre, ne en icelles prendre fourages ny enlever aucuns bleds, vins, chairs, foings, avoynes, pailles, poulailles, moutons, agneaulx, lards, chevaulx ne autres choses quelzconques, sinon du gré et consentement dudict sr de la Douze, ses procureurs et fermiers, ne pareillement attempter a sa personne, famille, receveurs et fermiers, lesquelz a ceste (fin) nous avons prins et mis, prenons et mettons en notre protection et sauvegarde spéciale. En signe de la quelle nous avons au dit sr de la Douze promis de faire mettre et apposer sur les principales portes de ses dites maisons, ou tel autre lieu éminent que bon luy semblera, nos panonceaulx, armoiries et bastons royaulx. A ce que aucun neu prétende cause dignorance. Et ou aucuns seroyent si téméraires et outrecuydez que de contrevenir a nostre dite présente sauvegarde, nous voulons que par le premier des prevostz de nos très chers cousins les maréchaulx de France, il en soit faict telle et si prompte pugnition quelle serve dexample a ung chacung. En tesmoing de quoy nous avons signé la présente de nostre main et a icelle faict apposer le scel de nos armes, car tel est nostre plaisir. Donné à St Quentin le IXme jour de décembre 1590.

Henry. Par le Roy, Notier.

Pour copie conforme : Mis d'Abzac de La Douze.

 

LETTRES AU MARÉCHAL DE BIRON[1].

écrites par ses cousins MM. DE GONTAUT DE SALIGNAC et DE SAINT-GENIEZ .

I

(1575) Lettre de Jean de Gontaut-Salignac concernant la capture du capitaine Polverel et le pillage de Salignac.

Monsieur,

Monsieur de Biron, chevalier de l'Ordre du Roy, capitaine de cent hommes d'armes, conseilher en son conseil privé et grand maistre de l'artillerie de France.

Monsieur, Pour respondre à celle qu'il vous a pleu m'escripre par M. de Flaujat[2] touchant la prinse du capitaine Polverel et son frère[3], je vous proumes que la dicte prinse fust faicte quatre jours avant que j'en seusse rien, et en fus marry ; et le suis maintenant davantage, vouyant la faveur que vous leur pourtés ; et si mes enfens fussent esté seulz à la prinse pour le désir que j'ay de salisffaire à vous voulantes, j'eusse uzé de droict de père. Mon ayné vous en escript que sera cause ne vous en tiendray plus long propos. Au reste, Monsieur, je vous diray que si mes voisins ussent tenu tant peu soy de compte de la suincte guarde que Monsieur le Maréchal de Monluc m'avoit envoyée par Monsieur de Floyrac, mes enfens, luy, les aultres qu'ilz ont esté contrainctz de tenir dans mon bourg pour la tuyssion d'icelluy et de mes aultres poures bonnes gens, nous ne fussions en esté peiné. Mais comme en dessaing de ceste sauvegarde, ils ont tant ruyné ma poure terre par pillaiges, emprisonnement et feu, que c'est une pityé, de le scavoir, qu'estoit la cause que si instement je vous prioys, par mes précédentes, me faire envoyer une lettre de mon dict sieur Mareschal à ceux qui commandent à Sarlat et aux fortz d'icy autour, ou bien quelqu'ung des vostres, affin que sur l'asseurance qu'il peust prendre, veulx j'eusse osté de ce lieu tous ceulx qui auroyent envye de faire la guerre : ce que j'ay toujours désiré et désire encore. Il ne faut que vous souyes en peine pour la sauvegarde, qu'il vous pleust m'envoyer, vous asseurant que je ne m'en suis aydé, ny personne ne l'a jamais veue, voyant le peu de conte qu'on avoyt faict de la précédente. Je atens le retour de Monsieur de Veyrières[4], par lequel je escripvis anplement ce que m'en senbloit. Ce sera l'endroict où presanteray à vous bonnes gens mes très humbles recommandations priant le créateur,

Monsieur,

en perfecte sanité, vous donne très longue et heureuze vye. De Salaignac ce XVe martz 1575. Votre très humble cousin et serviteur

de BIRON[5].

 

II

(1578) Lettre d'Armand de Gontaut sollicitant la mise en liberté de Meynier, médecin de Sarlat.

Monsieur,

Monsieur de Biron, cappne de cent homes d'armes des Ordonnances du Roy et Grand maistre de l'artillerye de France. — A Biron.

Monsieur, Je viens tout présentement d'estre adverty que quelques ungs de Sarlat, ont prins ung médecin dans le bourg de Beynac, où il fesoyt sa residance, qui estoyt dans Sarlat, et qui nous reste en luy seul en ce pays, qui me faict vous supplier très-humblement, Monsieur, que par vostre moyen je puysse sortir; parceque c'estoit luy qui me vouloit faire la diebte; et (il) n'en y a poinct peust-estre en toute la Guyene un pareil. Il se nomme Meynier. (Ce seroit) une perte irréparable pour tout le pays. Monsieur le mareschal de Monluc l'avoyt mis soubs la protection du Roy. Mays vous diriyés que vostre petit fournaise de vippères ne recognoyssoit personne.

Vous suppliant bien humblement derechef luy voulloyr, à ma comtemplation, estre agréable, ce qui vous sera fort facille. s'il vous plaist avoyr ung commandement exprès dud. seigneur mareschal, adressant à Puymartin[6], gouverneur de la place, au capitaine Solvignac[7], et quonsuls d'icelle ; et me voulloyr tant faire de grâce que quelqu'un des vostres passast par icy, pour leur aller faire le quommandement, il n'est homme de guerre ni entrepreneur ; bien est-il de la religion, se meslant simplement de son art et vocation.

S'il vous plaist, Monsieur, que celuy qui yra leur dye (dise) troys mots de grosses dents, je m'asseure qu'ilz le rendront. Et sy je ne m'estois dedyé de longue main à vous faire service, je vous en feroys a présent plus ample œffre, me remettant (?) en cest endroict bien humblement à voz bonnes grâces, priant le créateur vous donner,

Monsieur, en parfaicte sancté heureuse et longue vie. De Badeffou[8] ce xxD,e de apvril 1578.

Vostre plus humble et plus obeyssant cousin à vostre service.

Saint Gêniez[9] .

(P. S.) Monsieur, S'il vous playsoit, en attendant que la despesche de monsieur le Mareschal vinst, voulloyr envoyer deux de vos lettres, l'une adressaut à Puymartin et l'autre aux quonsuls de lad. ville, je les envoyrays à sa femme. Ce qui me faist telle liaslc, Monsieur, c'est qu'il est entre les mains des plus grans ennemys qu'il ayt en ce monde ; et si cela a lyeu, il est impossible que ceux de la Religion ne montent â cheval, car ils ne scauroient à quoy s'astreindre (1).

Pour copie conforme. :

Cte de Saint-Saud.

 



[1] Armand de Gontaut, baron de Biron, grand maître de l'artillerie en 1570, maréchal de France, tué au siège d'Epernay en 1592. Quand en 1581 Henri III le fit chevalier du Saint-Esprit, il se contenta d'apporter cinq ou six titres fort anciens devant le roi et le commissaire, et dit en les présentant : « Sire, voicy icy ma nobloisse comprinse, — puis mettant la main sur son épée il ajouta : — mais, Sire, la voicy encore mieulx. »

[2] Le savant annotateur de Tarde n'a pu identifier ce personnage, qui pouvait être un Durfort seigneur de Flaujac en Quercy, ou un Touchebœuf seigneur de Flaugeac en Sarladais.

[3] La famille Polverel existait encore en Sarladais au xviie siècle.

[4] François de Veyrières, seigneur de Saint-Germain et Campagnac en Quercy, beau-frère d'Annet de Comarque, seigneur de Pechgaudou. Il fut chef de bandes de protestants.

[5] Jean de Gontaut-Biron, baron de Salignac, chevalier des ordres du roi, gouverneur du Périgord, ambassadeur à Constanlinople où il mourut en l610.

[6] Raymond de Saint-Clar, chevalier, seigneur de Puymartin, chevalier de l'Ordre, époux de Louise d'Hautefort. Il avait contribué en 1562 à la défense de Sarlat. En 1577, son fils Renaud de Saint-Clar, appelé aussi le capitaine Puymartin, commandait la garnison catholique de Domme.

[7] Solvignac est une forme ancienne de Solminihac. Plusieurs membres de cette famille, ayant pris part à la défense de Sarlat et du Sarladais, à cette époque troublée, il est difficile d'identifier ce personnage qui fut gouverneur de Domme.

[8] Badeffou, forme ancienne de Badefol, baronnie des Gontaut, sur les bords de la Dordogne près de La Linde.

[9] Armand de Gontaut, baron de Badefol, seigneur de Saint-Geniez, chevalier de l'Ordre, sénéchal de Béarn en l564, gouverneur de Navarre en 1584, mort vers l594. Il avait épousé Jeanne de Foix.

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