Source: Bulletin SHAP, tome XII (1885), pp. 242-289 & 412-447.
ESSAIS TOPOGRAPHIQUES,
V.
- Canton de Nontron.
A la suite du canton
de Saint-Pardoux-la-Rivière, vient celui de Nontron, borné : à l'est, par le
premier ; au nord, par le département de la Haute-Vienne et par le canton de
Bussière-Badil ; à l'ouest, par le département de la Charente ; au sud, par les
cantons de Mareuil et de Champagnac-de-Belair.
Ce canton est
subdivisé en treize communes, savoir : Le Bourdeix, Saint-Estèphe, Augignac,
Abjat, Savignac-de-Nontron et Nontron, sur le terrain granitique ;
Saint-Martin-le-Peint, Javerlhac et Teyjat, sur le terrain granitique pour un
tiers environ, et, pour le surplus, sur le terrain calcaire ; enfin, les
communes de Saint-Front-de-Champniers, de St-Martial-de-Valette, de Lussas,
d'Hautefaye et de Connezac, sur le terrain calcaire.
Ainsi se
continue la zone de terrains signalée dans la description des cantons de
Thiviers et de Saint-Pardoux-la-Rivière, pour se terminer dans celui de
Bussière-Badil. Par suite, et à partir de la colline sur laquelle la ville de
Nontron a été construite, ainsi que des trois autres qui l'avoisinent à l'est
et à l'ouest, ce terrain, en remontant vers le nord, se compose de collines, de
tuf, parsemées de roches granitiques. Ces roches, sans stratification et sans
adhérence au sol. de forme généralement ovoïde ou à angles arrondis, même pour
celles recouvertes par le tuf à un ou deux mètres au plus de profondeur, ne
sont autres que des granits gris porphyroïdes et à gros grains de feldspath, de
quartz et de mica. Leur cassure se produit par éclats et la matière paraît
avoir été vitrifiée.
D'où viennent
donc ces blocs ? Sont-ils erratiques et ont-ils été charriés par les courants
primitifs jusqu'au sommet de la colline de Nontron et jusqu'aux portes de cette
ville, sur une ligne de démarcation bien déterminée et qui, partant de là vers
l'est et vers l'ouest, constitue leur point d'arrêt et la limite extrême de
leur pérégrination ? C'est ce qui expliquerait leurs formes ovoïdes. Ne
seraient-ils pas, au contraire, le produit des laves en fusion, lancées par les
volcans lors du soulèvement du plateau central et des montagnes de l'Auvergne,
dont les collines du Nontronnais ne sont que les contre-forts ; lesquelles
laves, comme tous les liquides, durent retomber en formes arrondies et
s'enfoncer plus ou moins dans les cendres mouvantes, d'où provient notre tuf
actuel ?
C'est ce que
nous laissons à décider par de plus savants que nous, en ajoutant, cependant,
que la seconde hypothèse nous paraît d'autant plus probable qu'elle
justifierait, en outre de la forme arrondie, la formation vitreuse de ces blocs
de granit.
Quoi qu'il en
soit, constatons encore que les trois collines de Nontron nous révèlent à leurs
extrémités, en contact autrefois avec le terrain calcaire et la mer jurassique,
les transformations dues à ce voisinage. C'est ainsi qu'à deux ou trois kilomètres
nord de Nontron et sur les plateaux se trouvent des carrières stratifiées du
vieux et du nouveau grès rouge, tandis qu'au sud les collines se terminent par
d'autres roches stratifiées de syénite, de gneiss, de schistes et de
talaschistes.
La colline au
sud-est de Nontron, dont elle n'est séparée que par l'étroit vallon du Bandiat,
offre encore ceci de particulier que, tandis que le granit et le gneiss se
trouvent du côté de ce vallon, le côté opposé longeant le vallon où passe le
chemin de fer, contient les premiers calcaires cristallisés, les dolomies, les
dentrites et les marnes irisées de l'époque secondaire, sans parler des
cailloux roulés qui couvrent le sol jusque sur le sommet et dans une étendue de
deux à trois kilomètres. D'où la conséquence que le dernier vallon, dit des
Rivaux, a dû former une des anses de la mer jurassique, dont nous parlerons au
chapitre de la commune de Saint-Martial-de-Valette, contiguë à celle de
Nontron, au sud-ouest.
Après cette
esquisse rapide de notre sol, nous devons y rechercher la trace des peuplades
qui s'y fixèrent dans les temps anciens, et nous la trouvons dans la
disposition de quelques-uns de ces blocs de granit dont nous venons de parler,
et dans les noms divers parvenus jusqu'à nous.
Or, à une époque
inconnue, disent les historiens, les Celtes, venus de l'Asie, envahirent
l'Europe de l'est à l'ouest et se fixèrent en grandes masses dans cette
dernière partie, à laquelle ils donnèrent les noms de Gaule, de
Gal ou Gael, synonyme
de Celte. Parmi les autres noms dérivés de la même
langue, M. de Taillefer, dans ses Antiquités de Vésone,
signale,
sur le canton de Nontron, ceux de Caudet et de Rhins, dans la commune d'Abjat ;
de La Besse, dans celle de Savignac; du Bourdeix, dans la commune de ce nom; de
La Doue et de Saint-Etienne-le-Droux, dans la commune de Saint-Estèphe, et
enfin celui de Nontron.
Quant aux
menhirs, aux dolmens, aux pierres branlantes, le culte des pierres,
lisons-nous, est de toute antiquité, et il était encore en usage au XIIIe
siècle, ainsi qu'il a été constaté par plusieurs conciles, tels que celui
d'Arles de 455, ceux de Tolède de 681 et 693, enfin celui de Nantes de 1264,
prescrivant d'enfouir ces pierres à dévotions : Lapides quas inruinosis et silvestribus locis venerantur.
Parmi ces monuments,
les plus remarquables, dans le canton de Nontron, sont les rocs branlants, au
nombre de cinq, dont nous reparlerons aux chapitres de leurs communes
respectives, sauf à signaler, dès à présent, les deux plus importants, savoir :
1° Roc branlant de Pot-Perdu ou de La Francherie, dans la commune de Nontron, entre ces
deux villages et celui de La Peyre, commune d'Augignac, qui lui doit son nom ;
au fond d'une gorge sauvage et entourée de trois côtés par des collines escarpées,
couvertes de bois et parsemées d'énormes blocs de granit. Du côté sud, où le
monument n'a pas été obstrué par le tuf descendant des collines, on voit, à sa
base, deux rocs reliés par trois autres plus petits et surmontés par une
immense roche oblongue presque à fleur de terre du côté nord, et présentant, à
l'ouest, une surface carrée de deux mètres environ hors du sol et à dos bombé.
C'est sur cette partie bombée que repose la pierre oscillatoire, immense table
triangulaire de cinq mètres quarante centimètres de longueur, trois mètres dix
centimètres de largeur et un mètre vingt centimètres d'épaisseur, laquelle n'a
pu être mise et rester en équilibre que par l'addition d'une petite roche
triangulaire ; ce qui démontre surabondamment que la main de l'homme a passé
par là. Le mouvement de cette table se produit, d'ailleurs, de l'est à l'ouest,
ainsi que nous avons pu le constater sûrement à l'inspection du soleil couchant
et, une autre fois, à l'aide de la boussole. Au-devant du monument et à l'ouest,
se trouve une vaste pierre plate, au ras du sol et inclinée sur laquelle
l'officiant devait se tenir à genoux, pendant que les assistants pouvaient
s'asseoir sur les roches rondes, placées en cercle autour de la première.
Enfin, derrière et proche de ces roches, existe encore la fontaine sacrée,
formant un petit ruisseau allant se perdre dans l'étroit vallon donnant, au
sud, issue à cette gorge, à laquelle le plan cadastral de la commune, section
A, a conservé le nom de Combefadas (Combe des
Fées). Nous trouvons aussi, sur le cadastre et dans la même section, une pièce
de châtaigneraie et pâtis désignée sous le nom de La Font des
Prêtres. On
remarque encore dans cette dernière pièce et sur le bord de l'ancien chemin de
Pot-Perdu, un amas de rochers et, parmi eux, une énorme pyramide couchée sur le
flanc et qui a dû être un menhir. D'où la conclusion que cet état de choses a
été évidemment créé pour servir au culte druidique.
2° Roc branlant de St-Etienne-le-Droux (Sanctus Stephanus deus Ledros ;
Sanctus Stephanus Le Drier), dont le surnom de Ledrez, Le Drier et Le
Droux dénote suffisamment son origine druidique, sans parler de sa situation
agreste auprès d'un ruisseau qui a conservé son nom celtique de La Doue.
Voici, au
surplus, quelle est cette situation que nous avons eu occasion de vérifier
plusieurs fois. Dans une gorge sauvage et resserrée entre deux collines
couvertes de bois et où l'on retrouve encore quelques blocs de granit, coule le
ruisseau de La Doue, sortant du grand étang de Saint-Estèphe. Le cours de ce
ruisseau a été recouvert par une longue suite de mêmes roches, superposées sans
ordre, couchées ou debout, comme si elles eussent été détachées du haut et des
flancs des deux collines par quelque cataclysme ou plutôt par la main de l'homme. Dans le
pays, cette chaîne porte le nom de Chapelet et, en tête, se trouve le roc
branlant dit Casso-Nausillo, composé d'une vaste table d'un mètre
environ au-dessus du sol et renflée vers le milieu. Sur ce renflement a été
posé un autre bloc de granit de forme ovoïde, qui s'est trouvé ainsi en
équilibre et se meut facilement de l'est à l'ouest, malgré ses fortes
dimensions de trois mètres de hauteur, non comprise la roche de soubassement,
sur huit mètres quarante centimètres de circonférence.
Mais à quoi ou à
qui attribuer la construction de ces rocs branlants ? M. de Taillefer rappelle,
à ce sujet, qu'un habile chimiste, membre de l'Académie royale de Madrid (M.
Chabaneau, de Nontron), après avoir fait la description du Casse-Noisette, ajoute :
« Si j'avais une
opinion à émettre, je dirais que ce jeu de la nature est produit par l'érosion
des eaux qui s'écoulent de l'étang; mais je dois vous prévenir que cette
opinion est plus que hasardée. »
Dans son Périgord illustré, M. l'abbé Audierne, parlant des deux
rocs ci-dessus, est beaucoup plus affirmatif et s'exprime ainsi :
« Quelques
écrivains ont prétendu que ces masses avaient été ainsi disposées par la main
de l'homme et qu'il fallait les considérer comme des monuments celtiques. Il
suffit d'inspecter ces prétendus monuments et les lieux qu'ils occupent pour
être convaincu du contraire. Leur pose oscillante n'est que l'effet du hasard.
»
De
son côté, et dans sa Dissertation sur deux
rocs branlants du
Nontronnais, M.
Ch. Des Moulins affirme que le roc de St-Estèphe lui paraît être un
accident naturel.
Nous sommes loin
de partager ces opinions, et nous pensons avec M. de Taillefer que :
« Les roches de Saint-Estèphe et de La
Francherie ont été choisies dans ce chaos et superposées par les Gaulois, qui
ont calculé leur centre de gravité pour les mettre en équilibre ; car un tel
hasard de la nature ne peut se présenter plusieurs fois de suite à une petite
distance. Cette conjoncture serait encore plus victorieusement réfutée si je
pouvais donner la liste de toutes les pierres mouvantes qui existent encore en
France et dans les pays occupés par les colonies gauloises ».
Or, nous n'avons
pas besoin d'aller chercher au loin la preuve de cette certitude ; car, en
outre des noms celtiques, de l'état agreste des lieux et des forêts, dont
parlent les conciles, le roc ovoïde de Saint-Estèphe a non seulement pour
compagne oscillatoire, dans notre contrée, et au sud, la roche plate de La
Francherie, ou plutôt de Pot-Perdu, mais encore, à l'ouest, la Pierre-Virade de
Javerlhac ; à l'est, le roc branlant de Rhins (autre nom celtique, dans la
commune d'Abjat); enfin, et au nord, une autre pierre mouvante dans la commune
de Saint-Barthélémy, limitrophe de celle d'Abjat. En sorte que le roc branlant
de Saint-Estèphe paraît avoir été le point central de tout un système
religieux, dont le caractère ressort encore de ce fait que, selon l'usage et
l'orientation druidique, le mouvement oscillatoire de toutes ces roches se
produit invariablement de l'est à l'ouest, ce qui est également exclusif de
tout effet d'érosion ou du hasard.
Cette situation
étant donnée, il en résulte que les habitants de la contrée durent
nécessairement chercher à défendre l'entrée des gorges et défilés pouvant
conduire au cœur même de leurs retraites religieuses, et qu'ils choisirent, à
l'extrémité de leurs collines granitiques, un piton isolé pour y construire un oppidum. Or, à
l'extrémité de ces collines, au sud-ouest, s'élevait à angle aigu et en forme
de promontoire s'avançant jusqu'aux limites d'un vallon calcaire, un
embranchement baigné au sud-est par une petite rivière et, à l'ouest, par un
ruisseau allant se jeter dans la rivière, au sud-ouest, et après avoir
contourné l'extrémité du mamelon. Cette extrémité fut détachée et isolée de la souche,
au nord, par un large et profond fossé, de manière à former un cône tronqué, au
sommet duquel fut établi l'oppidum.
De là l'origine
du centre de population gauloise auquel on donna le nom celtique de Nontron ;
d'où la ville et la commune, dont nous allons entreprendre l'historique.
COMMUNE
DE NONTRON.
§
Ier. — Fondation
et construction de Nontron.
D'oppidum
gaulois, Nontron devint, plus tard et après l'an 53 avant l'ère chrétienne, une
petite ville gallo-romaine, les Romains s'étant établis dans la contrée après
la défaite de Vercingétorix, ainsi qu'il résulte des traces qu'ils y ont
laissées et de la citadelle par eux construite sur l'emplacement même de cet
oppidum.
Après les
Romains vinrent les Goths, de 406 à 418, et, après ceux-ci, les Francs, qui, du
VIe au VIIIe siècle, en firent un castrum et le chef-lieu
d'une châtellenie. Ce castrum se composait alors : 1° de
la citadelle romaine agrandie ; 2° d'un premier groupe d'habitations
construites à l'abri et au-dessous des murs de la forteresse ; 3° et, au nord
de la forteresse, d'un second-groupe, entouré de remparts et de fossés, ainsi
que le tout résulte de l'état actuel des lieux et des titres suivants,
notamment de la donation qui en fut faite à l'abbaye de Charroux par Roger,
comte de Limoges, et Euphrasie, sa femme, dans leur testament du 4 des calendes
de juin 785, en ces termes :
« Dono
etiam in Leraovicensi pago castrum Netronensem cum praefati castri castellaniam
Cucillagium et Vadrerias (Mabillon, t. II,
f°
711). »
Voici,
d'ailleurs, quant aux détails inhérents à chacune des trois parties de cette
première agglomération :
Premier
groupe.
1° Forteresse
gallo-romano-franque. - Cette forteresse était assise, comme
nous l'avons dit, à l'extrémité d'une colline, détachée de la souche et au nord
par un large et profond fossé, et entre deux autres collines, séparées de la
première par un ravin et un ruisseau, à l'ouest ; et, à l'est, par l'étroit
vallon du Bandiat. La rivière et le ruisseau, se rejoignant au sud-ouest,
offraient la possibilité, au moyen de barrages, d'inonder tous les abords
jusqu'au fossé nord. La forteresse se composait d'ailleurs de trois enceintes :
la première, sur laquelle passe la voie actuelle conduisant à la gare du chemin
de fer, et dont les remparts dominant une partie de la ville basse, à l'ouest,
sont encore en bon état, tandis qu'on n'en retrouve que quelques parties au sud
et à l'est. La seconde enceinte domine la première et forme un plateau
quadrangulaire, soutenu par des remparts dans l'un desquels, et à l'ouest,
existe encore le soubassement d'une tour carrée. A L'angle nord-est de ce
plateau, aujourd'hui planté d'arbres, et sur l'emplacement d'une école et de
son jardin, se trouvait la troisième enceinte, renfermant de vastes bâtiments,
l'église de St-Etienne et le donjon, vaste tour circulaire de 30 mètres de
circonférence, dont l'entrée était à six mètres au-dessus du sol. Ce donjon
joignait l'une des deux tours de la porte d'entrée, et son soubassement s'élève
encore à quatre mètres environ. Les autres murs de soutènement sont aussi en
bon état, et l'on y remarque, à l'est, les restes d'une tour carrée. On y voit
aussi une vaste porte donnant accès de l'ancienne crypte de l'église et de la
troisième enceinte dans la première, au moyen d'un escalier étroit, découvert
il y a quelques années, lors de la construction de l'une des annexes de
l'école. On constata également, à cette époque, l'existence de la crypte
encombrée de matériaux d'anciennes démolitions. Il existe aussi, et du même
côté, une partie des anciennes casemates voûtées et qui servent aujourd’hui à
l’école primaire. Enfin, et à l’ouest, après le donjon, se trouvait un couloir
étroit et un escalier tournant conduisant de la seconde enceinte dans
l’intérieur de la première. Le couloir se fermait au moyen de deux portes,
retenues en dedans par de fortes barres de bois ou de fer, introduites dans
deux trous ménagés dans les murs à cet effet, et dont une partie existe encore
dans celui du jardin. Dans notre enfance, nous avons vu cet escalier complet et
nous y passâmes plus d’une fois pour aller jeter, dans un puits, des pierres
qui en faisaient résonner les parois en cartelage comme un son de cloche. Ce
puits était alors à moitié, comblé, et l’on disait qu’il ne servait pas
seulement à procurer de l’eau, en cas de siège, mais encore qu’il correspondait
avec un souterrain passant sous le Bandiat et allant sortir de l’autre côté,
vers le bois du Trou-de-la-Nauve.
Quoi qu’il en
soit de cette issue, parfaitement inconnue aujourd’hui, il en existait et il en
existe encore deux autres pour aboutir, du dehors, à l’emplacement de la
première et de la seconde enceinte de la forteresse. Le premier sentier (senta), d’un mètre de
largeur environ, part du sud-ouest et monte en serpentant jusqu’au
sommet ; le second, de deux mètres environ de largeur, va aussi en montant
du vallon du Bandiat et de l’est vers le nord, où il s’embranche avec le fossé,
qu’il remonte pour redescendre dans la basse ville, après avoir passé devant le
portail principal de la forteresse et au pied des deux tours rondes qui le
flanquaient et en défendaient l’accès. Ajoutons enfin, et pour terminer, que
l’accès de ce chemin et du fossé, à l’ouest, était encore défendu par une
tourelle à cul de lampe, bien conservée et pouvant contenir trois hommes,
placés en sentinelles aux trois meurtrières, dont les parois, usées par le
frottement des arbalètes et des mousquets, démontrent que, depuis longtemps,
elles ont servi plus d’une fois pour la défense et du fossé et des premières
habitations construites au pied des remparts et aux flancs de la colline, dont
nous allons parler.
2 Le Bragier,
Bragerio de Nontronio.— A la suite de la tourelle dont nous
venons de parler, au bas des remparts et en contournant la butte de l’ouest au
sud, du sud à l’est et de l’est au nord jusqu’au fossé, existent actuellement,
en angles saillants et rentrants, des carrés de jardins en terrasses soutenus
par les soubassements des premières maisons de Nontron, dont, au commencement
de ce siècle, on retrouvait les caves en nivelant le terrain. On en voit encore
deux au nord-est, l’une comblée et l’autre ayant dû servir de prison, la
basse-fosse qui en reste ne présentant d’autre issue au milieu de sa voûte en
pierre qu’une petite ouverture circulaire. Cette fosse dépendait d’une maison
forte, dominant et défendant l’entrée du chemin qui, après avoir atteint le
fossé de la forteresse, se bifurquait à droite et, se rétrécissant, grimpait
entre les constructions du Bragier, de l’autre côté du fossé et sous les murs
du castrum,
dont
nous parlerons bientôt. C’est ce qui résulte, en outre de l’état actuel des
lieux, des documents suivants :
Du 13 septembre 1416 :
« Arrentement en faveur du monastère de
Saint-Pardoux-la-Rivière par noble Guillaume de Burie, de diverses maisons
sises au Bragier de Nontron. — Du 4 février 1444, assence par le scindic du
monastère à Martial Robin, d’une maison et jardin ayant appartenu à feu Gérald
Prévost, sieur de Burie, size dans la ville de Nontron. — 10 mars 1445, Bernard
et Estienne de La Pourge, recongnoissent tenir du dit monastère une maison où
ils demeurent et une autre maison ruinée, tout proche, lesquelles ont esté de
feu noble Guillaume de Burie, confrontant avec la grande maison du dit sieur
appelée de Burie, possédée par Martial Robin, à lui assencée par le monastère
quatre sols. Signé de Poyalibus ». (Terrier dudit monastère.)
Du 11 février
1457, arrentement par Alain de La Porte d’un jardin sis au Bragier de
Nontron :
« Nobili viro Alano de La Porta domino de
Champnerio et in parte de La Bestorij pro se et suis heredibus et successoribus
et pro nobilem Iterium de La Porta suum nepotem... Et honesto viro domino Yvone
de Crucis capellano pro se et suis... Ejusdem nobili Alano de La Porta non
cohactus, non deceptus... dimisit et perpetuo quittavit seu ad assensam
amphiteosim perpetuant tradidit... dicto domino Yvone de Crucis... Videlicet
quodam viridarium, quod est sitnm in Bragerio de Nontronio, sub muro castri de
Nontronio, quadam via intermedia ex una parte et via ex qua itur de castellania
de Nontronio versus domum de Grava.sub censu seu redditu annali quindecim
denarii.... »
Signé Veterimari
(Vieillemard).
Ce jardin, qui
existe encore, est situé au nord-est, en face de la forteresse et de l'autre
coté du fossé, joignant le chemin qui, se bifurquant avec ce fossé, montait, à
droite, au quartier du fort, qualifié de castellania ; c'est ce qui résulte surabondamment des
deux reconnaissances suivantes. La première consentie en faveur de Thomas de
Conan, du 29 mai 1747, s'exprime ainsi :
« Sur
certaines chenevières autrefois en jardin, situées au lieu appelé le Bragier de
Nontron, au-dessous les murs de l'ancien château, chemin entre deux et y
confrontant, d'une part, et au chemin par lequel on va de la chastellenie du dit Nontron, à présent le château brûlé vers le
Bandiat, sur main droite, et à certaines maisons à présent en mazures estant au
dessus du dit chemin... (Petit, notaire). »
On lit dans la
seconde de ces reconnaissances, reçue Labat, notaire, et consentie le 22
septembre 1775, en faveur de M. Alexis de Conan :
« Sur trois petites chenevières au lieu appelé les
Bragiers de Nontron, au-dessous les murs de l'ancien château où est
actuellement l'église de Saint-Etienne, confrontant du levant au chemin de
servitude qui va du château au moulin de Nontron, actuellement appelé
Moulin-de-la-Nauve, sur main droite ; du midy à autre chemin qui va de l'église
Saint-Etienne au dit moulin, sur main gauche, du couchant au jardin de Mlle de
Labrousse, et, au nord, à une maison et jardin et à autre jardin dans lequel il
y avait anciennement de vieilles masures. »
Tel est encore l'état
des lieux, avec ces modifications que le grand pont en pierre, sur lequel
débouche l'avenue de la gare, a été construit sur l'emplacement du jardin de
Mlle de Labrousse, et que la maison au nord a disparu, laissant à sa place un
jardin attenant à deux autres, retenus, au bord du fossé, par les soubassements
des anciennes constructions.
C'était là,
d'ailleurs, et au nord-est, que commençait le quartier du Bragier, que nous
allons parcourir en contournant, de l'est au sud et à l'ouest, la butte de la forteresse.
Du 14 juillet
1445, vente d'une maison située au Bragier de Nontron :
« Johannes Mesmer, sutor de Nontronio... vendidit
dilecto in Christo domino Helie Laud, presbytero presente ville de Nontronij,
quadam domum sitam in Bragerio de Nontronio, et confrontatam cum domo ipsius
venditoris, ex una parte et cum domo que quondam fuit magistro Petro de
Poyalibus ex alia et cum rua publica ex altera et muro antiquo reliquis...»
Du 31 mai 1457,
baillette par François de La Porte d'un jardin situé sous les murs de la tour
Paulte :
« Nobilis vir Franciscus de La Porta, tam nomine suo
et nomine nobilis Joannis et Tristandij de La Porta, domicellis fratres suos
germanos... assensavit perpetuo et ad assensam et amphiteosim perpetuant
tradidit... Guilhelmo de Valfoullonse...quodam viridarium situm in parochia de
Nontronio, subter parietes turris Paulte, inter viridarium de Germon, ex una
parte, et dictos parietes turris Paulte... sub censu seu redditu annali quinque
solidos et sex denarios de acaptamento... Signé Aymerico di Charlangis ».
Les trois titres
ci-dessus, ainsi que la majeure partie de ceux que nous aurons à analyser,
proviennent des archives de la famille de Conan, déposées à celles de
Périgueux, sauf indications contraires. C'est ainsi que nous recueillons encore
dans le terrier du monastère de Saint-Pardoux-la-Rivière, les mentions
suivantes :
« Du 3 febvrier 1499, Perrot de La
Poutge recongnoit certaines murailles scizes au Bragier de Nontron, confrontant
aux mazures de feu Martial Robin, appelées de Burie, et à la maison du dit
recognoissant, mouvante du dit monastère, ruelle entre deux, et au chemin qu'on
va de la maison du chapellain de Nontron vers le dit
Bragier. »
« Du 20 mars 1557, Me Pierre de La Roussie,
procureur de la juridiction de Lussates (Lussas), habitant de Nontron, déclare
avoir acquis de feue la Séguine, dont il est parlé dans la
reconnaissance du 3 febvrier 1499, la tierce partie d'une maison et jardin au
Bragier de Nontron, confronte à la maison et jardin de Dauphin Escousseau et le
chemin que l'on va de la chapelle de Nontron à la porte appelée de Guilhaume
Blanc. Signé Vigier, notaire ».
Il doit s'agir
ici de la chapelle de la forteresse et du chemin situé au sud-ouest, et sur
lequel la porte de Guillaume Blanc devait se trouver au point d'intersection
des murs de la première enceinte, murs et chemins contigus, à l'ouest à des
terrains, bâtiments et jardins, appartenant encore aujourd'hui à la famille
Escousseau.
Si nous
consultons, enfin, la matrice cadastrale de la commune de Nontron, nous y
trouvons, sous les numéros 439, 440 et 441, des jardins dits au Breger. Ces
jardins ne sont autres que des emplacements d'anciennes maisons bordant le
sentier montant du sud-ouest à la forteresse ; et, lors de la construction, en
1883, d'une maison près du pont neuf de la route de Villars, on y découvrit des
ossements humains et des traces d'incendie.
Au surplus, ce
quartier du Bragier, le plus exposé aux coups de l'ennemi et détruit en partie
pendant les guerres anglaises et au XVe siècle, ainsi qu'il résulte
des actes ci-dessus, dut l'être complètement au XVIe et à la suite
des guerres de religion, puisqu'il n'en reste que des vestiges. Mais passons au
second groupe, aujourd'hui quartier du Fort.
Deuxième
groupe.
Quartier du
Fort. — En
remontant vers le nord, la colline dont la forteresse gallo-romano-franque
occupait l'extrémité, d'une étendue, sur le plateau, de cent cinquante mètres
environ de longueur et quatre-vingts de largeur; et au-delà d'un fossé de vingt
mètres, il en fut détaché une seconde partie, à peu près de même étendue et
séparée de la souche par un second fossé de quinze mètres environ ; de telle
sorte que, pour compléter la défense, à l'est et à l'ouest, il n'y eut plus
qu'à tailler le roc à pic et le revêtir d'épaisses murailles, qui existent
encore. Après quoi, les deux issues du sud et du nord, sur les deux fossés,
furent fermées par deux portes. La première, en face de celle de la forteresse
et défendue par une tour carrée dominant le ravin, à l'ouest, portait le nom de
porte Rascot.
La
seconde de ces portes, au nord, fut appelée, au XIIIe siècle, la
porte du Barry, parce qu'elle donnait accès au faubourg de Nontron. Quant à
l'étroit sentier du sud-est, dont nous avons déjà parlé, il devait être
également barré, mais, dans tous les cas, il était défendu, à droite et à
gauche, par plusieurs maisons fortes dominant le Bragier, d'après les
baillettes analysées précédemment et dont les soubassements existent également
jusqu'à deux tours rondes dont les restes dominent encore, du haut de leur
rocher, la vallée du Bandiat. Dans cette nouvelle enceinte et sur les deux
autres côtés, est et ouest, ainsi qu'au centre du quadrilatère, s'élevèrent
d'autres constructions qui formèrent deux rues parallèles, reliées par deux
autres rues transversales, le tout aboutissant à la porte Rascot. Au nord, se
trouvait une petite place, entourée de constructions et défendue, à l'angle
nord-ouest, par la maison forte d'Espern ou d'Esport; et, enfin, à
l'angle nord-est, par le château-fort des Peytavis, que les moines de l'abbaye
de Charroux, en Poitou, firent construire après la donation de 785, et dont il
reste encore une partie de tour ronde et les soubassements sur lesquels a été
construit le château actuel. Au surplus, et de même qu'il existait dans le
Bragier les maisons fortes et nobles de Burie, de Grave, de Panet, il y avait
aussi, dans la seconde agglomération, les repaires de La Beytour, de
Montcheuil, de Valette, de Paulte ; les maisons nobles de Lestrade et
d'Esperne, le château des Peytavis. C'est ce qui résulte de l'état des lieux et
des documents suivants.
Du 11 avril
1376. - Bail à cens par Guilhaume de La Rivière, d'un emplacement situé dans le
castrum de Nontron :
« Nos judex vicecomitati Lemovicensi, notum facimus
universis et coram scriptore nostro infra scripto ad hoc deputato et appellato
personnaliter, constituti Guilhelmo deRepperij pro se et suis heredibus et
successoribus universis, ex una parte, et Guilhelmo Balhol et Guilhelmo
Bordelli, pro se et suis ex altera, prefatus Guilhelmus de Repperij non
cohactus, non seductus... assensavit et perpetuum dimisit ad amphiteosim
perpetuam... predictis Guilhelmo Balhol et Guilhelmo Bordelli... pro anno censu
seu redditu duos solidos monete solvendos... dicto Guilhelmo de Repperij et
suis duos denarios in festo Nativitatis Domini, et duodecim denarios in festo
sancti Stephani... Videlicet quoddam placeam suam sitam in Castro Nontronij,
inter domum dicti Guilhelmi de Repperij, ex parte una, et placeam domini Helie
de Lestrada,
dux milicis, ex
altera... Datum et actum... undecimo die mensis aprilis, anno Domini m° ccc°
septuagesimo sexto... Hel. Canulis, R. »
Du 12 avril
1441, échange entre Jean de Bretaigne et Marie Colette, veuve d'Aymard de La
Porte, de deux maisons situées dans le fort de Nontron, suivant l'acte
ci-après, communiqué par M. de Saint-Martin, l'un des derniers représentants,
par sa femme, de la famille de Conan, dans lequel il est fait mention de la
porte Rascot, des hôtels de La Bestour, de Moncheuil, de Paute et du repaire de
Valette :
« Nos custos sigilli auctentici vicecomitati
Lemovicensi, ad contractus et similia constituti... Notum facimus universis tam
presentis que futuris de coram quondam magistro Petro de Poyalibus, notario
publico, defuncto tempore quo vivebat predicti sigilli commissario jurato die
anno, et presentibus testibus quibus infra constitutis, et presenti constitutis
illustrissimo principe et domino Johanne de Britannia, et comite comitatibus de
Penthenvrie et Petragoricensis vicecomite que vicecomitatu Lemovicensi et
domino Davesne, pro se et suis heredibus et quibus suis successoribus ex una
parte. Et nobilia et honesta mulier Maria Coleta, domicella relicta condam
Adhemari de Laporta, domicelli, mariti sui, domina de La Bestour et de Valetta, pro
se et suis heredibus et successoribus universis ex parte alia. Prenominate
inscripte partes... non cohacte, non seducte, nec per aliquem in aliquo movente
ymo gratis sponte... ad perpetuum permutaverunt videlicet prelibatus dominus Johannes
de Britannia comes pro se et suis permutans... cessit, tradidit... Vidua
nobilia Maria Coleta, domicella presente et pro se et suis stipulante et
recipiente quodam domum cum quodam orto a parte retro eidem domui contiguo
movens de fundali et directo dominio prelibati domini vicecomiti Lemovicensi
est assebat sitam et positam in Castro
forte
de Nontronio
confrontatam cum muro dicti castri ex
uno latere et a parte orientali et cum itinere quo itur de porta dicti castri
ad hospicium
de La Bestour ab alio latere
et a parte occidentali et a
parte retro cum quodam
viridario hospicii
de Moncheuil et a parte
altera cum senta quae itur de dicto hospicio de Moucheuil ad dictum murum cum
aisinis, juribus et pertinentes universis... Quos quodam domum et ortum tenebat
et exploitabat Johannes de Lage a dicto domino vicecomite sub censu annali
quinque solidos monete currente quali anno quolibet solvendi per dictum
Johannem ipso domino vicecomite Lemovicensi et suis in quolibet festo
Nativitatis Domini ut ipse dictus vicecomes assebat. Cum et pro quodam domo
ejusdem domicelle domus antiquae nobilis ut ipsa domicella assebat reppayrij de Valetta, ad dictum que reppayrium movente de fundali et
directo dominio ejusdem domicellse et quodam domum tenet et exploitat Hellias
de Ruppe, tenens ejusdem ab
eadem domicella sub
censu annali quinque solidos et una gallina censu anno quolibet ipse domicelle
et suis per dictum Helliam... confrontatam et positam dicto castra forte de Nontronio, inter hospicium predicti de Moncheuil[1] eidem que
contigua ex una parte et inter dictum iter quo itur de porta dicta Rascot ad dictum hospicium de La Bestour ex alia et inter hospicium defuncti Reymondi Faute
domicelli partibus ex
reliquis cum ejusdem domui jam confrontati aliis juribus aisinis... (Suivent
les clauses de garanties et de transmissions.) Datum et actum... presentibus
ibidem nobilibus Galterio de Raduel, Johanne de Rouchaco, domino sancti Johanni
Ligore, Johanne de Las Tours, chanonico de Boubon et domino Johanne Regis
capellano de Brantomo, testimus ad premissa vocatis et rogatis. Die xij mensis
aprilis anno Domini m° cccc° quadragentesimo primo ».
Des trois
hôtels, du repaire et des deux maisons mentionnés dans cet acte, il n'existe
plus que la maison cédée par Jean de Bretagne et désignée ainsi qu'il suit dans
une reconnaissance de rente du 21 septembre 1775, reçue Labat, notaire royal,
et consentie par Mlle Marie de Labrousse en faveur de M. Alexis de Conan, sur :
« Une maison avec un petit jardin, rue entre deux,
et cour y attenant, dans la ville forte, laquelle se confronte du levant au
chemin ou rue par laquelle on vat de lesglise de St-Estienne à celle de
St-Sauveur, qui passe entre deux, et au jardin et maison de Jean Bertrand, et à
un sentier qui va de lesglise de St-Estienne au moulin de Nontron, qui est au
bas du château, du midy et couchant à autre chemin ou sentier par lequel lon
vat de la dite église de St-Estienne dans la rue du Rieu, et confronte aussi à
la ditte rue publique du Rieu par le devant, et du nord à autre maison
appartenant à la dilte demoiselle. Laquelle maison et jardin est située
vis-à-vis l'ancienne porte du château fort de Nontron, et qui fait face à
icelle, et avec ses autres plus amples et meilleures confrontations, et sur
laquelle il y a une espèce de pavillon... .
C'est le
pavillon qui existe encore en face de la tour ronde, au nord-ouest de la porte
de l'ancienne forteresse, dans laquelle se trouvait l'église de Saint-Etienne,
pavillon qui nous parait avoir été placé sur le soubassement d'une ancienne
tour carrée servant, avec la porte Rascot, à la défense, sur ce point, de la
seconde agglomération. Il nous parait aussi résulter de cet acte que l'hôtel de
Montcheuil s'élevait au nord et au-delà des jardins dont parle l'échange de
1441, et sur les murailles d'autres jardins que l'on voit à l'est du nouveau
pont conduisant au plateau de cette forteresse. Quant aux autres hôtels et au
repaire, il résulte des mêmes confrontations que leur emplacement se trouvait
au nord-est, parmi les soubassements qui dominent encore les deux sentiers
conduisant à la forteresse et au quartier du fort, et se terminent par les deux
tours rondes du repaire de Valette, lesquelles dominant la petite vallée du
Bandiat, ont dû lui donner son nom de Valette, petite vallée.
Du 27 février
1486 :
« Perrot Delapouge reconnaît tenir de noble homme
Elie de Conan certaines murailles situées au Bragier de Nontron, confrontant
une maison des héritiers de feu Giraud Marquet et aux murailles des héritiers
de feu Giraud Levet et au chemin qu'on va de la porte Rascot à la maison de
Burie, sous la rente directe de trois deniers. Signé : Fouriandi. »
Du 27 février 1487
:
« Acte récognitif de rente reçu primitivement par
Robin, notaire. Simon de Labrousse, marchand de Nontron, recongnoit tenir de
noble homme Elie de Conan, une maison située dans la ville forte de Nontron,
confrontant du côté du devant avec la rue publique qu'on va de la porte duBary
a lesglise St-Estienne de Nontron... soubs la rente directe de six deniers.
Faict le 27= de febvrier mil quatre cent huictante sept. Signe : Fouriandi. »
Du
12 novembre 1499, assense par Pierre Pastoureau jeune, à Pierre de Labrousse,
de douze sous et neuf deniers de rente sur :
« Domum sitam intra villam fortem de Nontronio,
confrontatam a parte ante cum una rua publica qua itur de ponte du Bary ad ecclesiam
parochialem Sancti-Stephani de Nontronio, a parte retro cum quadam domum Petri
Fabri dicti Bailhot, quodam carreolum in medio ab uno latere cum quadam parvera
rua qua itur de jam dicta rua publica de ponte du Bary ad ruam nigram et ab
alio latere cum quadam domum jam dicti Petri Fabri. Signé : P. de Domailhaco..»
Tel
était bien, d'après cet acte, l'ancien état intérieur de la ville forte, ayant
deux rues latérales allant du nord au sud ; celle de l'est se dirigeant de la
porte et du pont du Bary vers l'église Saint-Etienne, et celle de l'ouest, dite
rue Noire, séparées, l'une et l'autre, par un groupe de maisons, mais reliées,
vers le milieu, par la petite rue transversale, parvera rua, ci-dessus. Ce groupe est, aujourd'hui,
occupé par l'école primaire de filles, ayant, par derrière, la rue Noire, dont
il ne reste plus que le rang de maisons dominant la basse-ville ; et, sur le
devant, la rue de l'Eglise, élargie et entièrement transformée.
Du 6 novembre 1588,
devant Fonreau, notaire, titre de dix sous de rente consenti :
« En la ville de Nontron et la grand place du dict
lieu, avant midy... par monsieur maistre Thibaut Pastoureau, seigneur de La
Grange, juge royal provisionnel et lieutenant du dict Nontron... a Gabriel
Moureaud... sur certaine maison aprésent ruynee et desmolie, en dedans laquelle
y avoit antiennement ung four, assise et sittuée au dedans la ville forte du
dict Nontron, autrefois appartenant a Jehan Guilhot et Anne Le Reclus,
confrontant (à trois maisons) et aussy avec aultre maison ruynée, et par le
devant avec la rhue que lon va a la grande esglise de la présent ville... »
Il doit s'agir ici du
four d'Aixe, mentionné par Doat, v° 241, en ces termes :
« 1357 — Instrument mentionnant que certaine maison assise
au bourc de Nontron, entre le four d'Aixe et la maison de Jacques Peytoureau,
est de la fondalité du vicomte. Dies dominica post festum Bti
Marcialis, anno Domini m° ccc°, quinquagesimo septuagesimo. »
Du 18 mars 1658,
devant Lenoble, notaire, reconnaissance de trente sols de rente en faveur de
Bertrand Audier, seigneur de Montcheuil, sur :
« Une maison située en la vieille ville, appelée le
Fort, confrontant du levant au chasteau du seigneur de Nontron, par le devant a
la rue qu'on va du dit chasteau, ou du pont du Barris a l'esglise St-Estienne,
conformément à la reconnaissance de 1576. Reçu Mestayer, notaire. »
« Du 2 novembre 1740, devant Grolhier, notaire,
vente par Agard à Blois, d'une maison dans la ville vieille, dans la rue par
laquelle on va du château à la grande église. Fondalité du sieur Dubarry,
seigneur de Puycheni. »
« Du 14 janvier 1747, devant le même notaire, vente
d'une boutique dans la rue du vieux fort de Nontron, joignant du septentrion à
la place du château. »
« Du 21 septembre 1775, devant Labat, notaire,
reconnaissance de six deniers de rente à M. Alexis de Conan par Henri Guérin,
sur le plassage et vestige d'une ancienne maison sis et situé dans le fort, qui
se confronte du levant à la rue publique par laquelle lon vat du nouveau
château à l'église de St-Etienne, sur main droite ; du nord au plassage des
Lacotte, dits Fontarabie ; du couchant aux maisons des nommés Ferré et
Rebièras, du midy a la maison du dit reconnaissant. »
Après avoir
ainsi constaté l'existence, dans le castrum ou quartier du Fort, des deux
portes, des trois rues et de la place dont nous avons parlé, il ne reste plus
qu'à indiquer l'emplacement de la maison forte d'Espern ou d'Esportet du
château des Peytavis, construits à l'angle nord-ouest et à l'angle nord-est du
quadrilatère pour en défendre l'accès, et entre lesquels se trouvaient la porte
et le pont du Barri, ou du faubourg dont nous parlerons bientôt.
La maison noble
d'Esport était située en face du château des Peytavis et de l'autre côté de la
place, au nord-ouest, d'où elle dominait et défendait une partie de l'étroit
vallon où l'on construisit la ville basse et la place du Marchadieu. Au xviiie siècle, elle
servait de prison et de prétoire pour la justice. Elle a été séparée de la
place en 1850-51 par l'ouverture d'une rue reliant le quartier du Fort et la
haute ville aux basses rues, d'après les plans dressés en 1849, sous notre
administration municipale. Il ne reste plus qu'un pan de mur de cet édifice,
encastré dans celui d'une maison moderne construite sur son emplacement.
Nous en avons
trouvé la mention dans divers titres de rente, et notamment dans une
reconnaissance du 3 juin 1568, devant Laud, notaire, en faveur de Geoffroy
Dubarry, escuier, sieur de Puycheny et Deyport, sur une maison de Nontron
mouvant et pendant du fief noble de la maison Deyport.
Autre
reconnaissance du 10 mai 1608, devant Fonreau, notaire, renouvelée le 5
décembre 1643 devant Durand, notaire, en faveur d'Antoine Dubarry, escuyer,
seigneur de, Puycheny et du repaire noble d'Esport, sur une terre au mas de
Fargeas, près Nontron, de vingt deniers de rente portable à chaque fête de Noël
dans la maison noble d'Esport, sise et située dans le fort de la dite ville.
Quant au château
des Peytavis, voici quelques documents à ce sujet :
Du 14 juillet
1445, acte de vente, déjà mentionné, d'une maison sise au Bragier de Nontron,
mouvante du seigneur des Peytavis : Movens de fundalitate et directo dominio
de Peytavis sub censu duos solidos.
Du 4 juin 1540, hommage
rendu par Jean et Louis de Puyzillon, seigneur de La Roderie, au roi de
Navarre, seigneur de Nontron, de la maison noble et repaire des Peytavis.
En 1609, hommage
rendu à la Chambre des comptes par François Dufaure, seigneur de La Roderie, du
fief des Peytavis.
Du 5 octobre
1655, vente reçue du Basset, notaire, par dame Anne de Gives, veuve de messire
Antoine d'Agues-seau, premier président au Parlement de Bordeaux, à messire
Philibert-Hélie de Pompadour, marquis de Laurière, du fief et repaire noble des
Peytavis, en la ville de Nontron.
Des 5 juin 1743
et 10 avril 1770, devant Boyer, notaire, vente de divers terrains situés à
Azat, près Nontron, chargés de rentes au profit du marquis de Lavie, comme
étant aux droits de messire Philibert de Pompadour et de Mme de
Courcillon, ceux-ci à ceux de messire Antoine d'Aguesseau, ce dernier
adjudicataire des biens et rentes de François Dufaure, seigneur de La Rhoderie
et des Peytavis.
D'après diverses
notes, le château des Peytavis fut incendié en 1672 et 1713, sans que,
malheureusement, il soit fait mention des causes de ces événements, non plus
que dans les reconnaissances de rentes de 1775, dans lesquelles il est parlé du
château
brûlé. Ce
ne fut que du 18 avril 1768 au 12 janvier 1772, et au prix de 21,076 livres
onze sous, que M. de Lavie fit construire le château actuel sur les fondements
et soubassements du premier.
Quelques
années après, et par acte du 7 octobre 1787, M. Louis-Gabriel de La Ramière,
fondé de pouvoir de M. Paul-Marie-Armand de Lavie, céda :
« A titre de
bail à cens et sous-fief, ou vente annuelle, foncière, directe et solidaire,
emportant tous droits et devoirs seigneuriaux ordinaires à Monsieur
maître Jean-Baptiste-Michel de Mazerat, avocat en la cour, juge sénéchal de la
ville et baronie de Nontron... le château appartenant au dit seigneur de Lavie,
dans la dite ville de Nontron... confrontant... du couchant à la place appelée
du Fort... Plus l'emplacement et masures d'une grange démolie qui fait face au
dit château, confrontant du levant à ladite place du Fort, du couchant aux
anciens fossés de la ville ; du nord aux prisons, maison du concierge et
parquet de la dite ville ; du midi à un petit jardin et, en partie, à la rue
appelée la rue Noire ou des Chèvres[2] . Le dit bail à cens et sous-fief ainsi fait à la
charge par le dit sieur de Mazerat et les siens, de payer et servir
annuellement au dit seigneur de Lavie et en cette ville, à chaque fête de Noël,
un cens et rente directe et solidaire de cinq sous monoye de cours de ce jour,
de deux sous d'acapte à chaque mutation de seigneur et de tenancier, et en
outre pour la somme de dix mille livres de deniers d'entrée, laquelle le dit
sieur de Mazerat a tout présentement et réellement payée... Et comme le dit
château et dépendances, ainsi que l'emplacement et masures de la dite grange,
faisoient partie intégrale et foncière du fief des Poitevins ou Peytavis, relevant
à hommage de la baronie et seigneurie de Nontron, dont il est distinct et
séparé, je déclare pour le dit seigneur de Lavie investir le dit sieur de
Mazerat dans les fonds à lui inféodés et lui faire grâce et remise de tous
autres et plus amples droits d'investiture ».
Cet
acte, fait en double et sous-seing privé, ne fut déposé que le 30 mai 1793 par
Mme veuve Mazerat, au rang des minutes de Me Grolhier, notaire à Nontron.
Voilà pour ce
qui est de l'intérieur du quartier du fort. Quant à l'enceinte, aux murs, aux
fossés et aux portes, ils existent encore en majeure partie, bien qu'ils aient
été, à partir du XVe siècle, l'objet d'empiétements successifs,
d'après l'état des lieux et quelques-uns des documents de l'époque, et
notamment ceux qui suivent :
« En 1495, procès
devant le juge de Nontron par le procureur du sire d'Albret contre aucuns
particuliers voulant bastir maisons dans les fossés de la ville. »
En 1608, le seigneur de Nontron fit assigner
François Dufaure de La Roderie, possesseur du fief des Peytavis, pour démolir
un pavillon qu'il avait fait bâtir sur les murailles de la ville. .
« Du 1er octobre 1722,
devant Danède, notaire, délaissement par M. de Launay, fondé de pouvoirs de M.
le marquis de Pompadour, à M. du Basset, des fossés du château de Nontron. »
Enfin, et quant
aux portes de Rascot et du Barri, la première doit avoir disparu vers le XVIIe siècle,
car on n'en retrouve aucun vestige, et il n'est question, dans les actes de
cette époque, que du pont en pierre, substitué au pont-levis du Barri, et sur
lequel on passe encore pour aller de la Grand'Rue dans le quartier du Fort. Une
de ces portes, cependant, existait encore, pour partie, en 1792 ; car, le 21
janvier de cette année, d'après le registre conservé à l'hôtel-de-ville, le
conseil de la commune ordonna : « La réparation, et, à défaut, la démolition du
portail par lequel on va à l'église de St-Etienne de la présente ville, qui
menace d'une ruine prochaine... »
Et il constate que : « Cet
objet est indivis entre Mme de La Ramière et M. de
Fayole. »
Or, il
résulterait de cette indivision qu'il s'agissait de la porte du Barri, placée
entre le fief des Peytavis, acquis de M. de Lavie par M. de
La Ramière, et la maison noble d'Esport, appartenant à Mme de Fayolle, née
Dubarry, porte dont on ne parlait plus, étant hors de service, et son
pont-levis ayant été remplacé par le pont en pierre.
Telle fut, à la
fin du XVIIIe siècle, la situation topographique de nos deux
premiers centres d'habitations, qui eurent St-Etienne pour église paroissiale,
et pour cimetière le lieu même où se trouve aujourd'hui la place de la Cahue,
ainsi que nous avons pu le constater il y a une vingtaine d'années, à
l'occasion de la construction d'égouts dont les fouilles mirent à découvert, au
milieu de cette place, de nombreuses et très anciennes sépultures.
Il résulte
également de ce qui précède et de ce qui va suivre que si la ville de Nontron
a eu pour berceau une forteresse, elle a dû aussi à des établissements
religieux ses développements successifs, et ce dès le commencement du IXe
siècle. Passons donc à ces autres centres de population.
Troisième
groupe.
Après que les moines
de Charroux eurent complété et clos le castrum de Nontron, qui leur avait été
donné en 785, leur premier soin fut de fonder, en 801 et à l'angle sud-est du
cimetière, un couvent de Bénédictins avec son moustier, dédié au Saint-Sauveur;
puis, au nord du quadrilatère, une aumônerie ou Hôtel-Dieu, avec sa chapelle et
une halle; le tout éloigné de 200 mètres environ du castrum. A la suite de ces
établissements, quelques constructions s'élevèrent des deux côtés de la voie
conduisant de ce castrum au couvent, à l'aumônerie et à la halle, autour
desquels s'en créèrent d'autres ; de telle sorte qu'il se forma, du IXe
au XIIe siècle, une troisième agglomération, plus étendue que les
deux autres et contenant le Barri, ou faubourg, s'étendant de la moitié du Grand-Puy-de-Bayet,
à l'ouest, et à partir de la rue des Fossés et de l'escalier actuel jusqu'au
cimetière ; 2° la place de la Cahue, qui succéda à ce cimetière lors de la
création de celui de Saint-Mathurin, avec prolongement sur une voie partant de
l'angle nord-est, et un autre jusque vers le milieu du Petit-Puy-de-Bayet,
débouchant à l'angle ouest du quadrilatère jusqu'à la rue dite rue des Fossés.
Le tout était clos et défendu : à l'ouest, par des murs élevés, bordés par un
fossé, continuant celui du castrum, et par deux portes aux deux Puy-de-Bayet.
Au sud-est, les maisons étaient défendues par des jardins, dont les terrasses
élevées formaient des remparts dominant le petit vallon du Bandiat et qui
existent encore. Enfin, cette partie de la ville était également close : au
sud-ouest par le fossé du castrum et la porte du Barri ; et, au nord, par la
porte Limousine. C'est ce qui va résulter des documents suivants :
1° Barri, ou
faubourg, aujourd'hui Grand'rue :
« En 1313, hommage par Petrus Tisonis, miles, à
Yctier de Maignac, miles, de divers biens, et sur une treille assise près du
pont du Barri de Nontron. Die Veneris in exaltatione an° Domi
trecent° decimo tertio. » (Doat.)
1335.
Vente par Guillaume de Grave, à Itier de Magnac, de deux deniers de rente sur
une maison sise dans la rue du Barri de Nontron, joignant deux autres maisons :
«Nos judex vicecomitatus Lemovicensis, notum facimus
universis quod coram jurato et testibus infrascriptis personnaliter constitutis
Guillelmo de Grava, domicello pro se... Et Iterio de Manhaco, milite, pro se...
predictus Guillelmus... vendidit... eidem militi... pretio trigenta et duorum
solidorum monete currentis... quos tringenta et duos solidos ipsius venditor
recognovit recepisse ab eidem emptore duos denarios censuales cum directo et
fundali dominio quos duos denarios... venditor asservit se habere annuis
singulis in et super domum et solare que quondam fuerunt Gerardi et Johannis
Aymerici sitam apud Nontronium in carveria de Bario, inter
domum que quondam fuit Gerardi Vigerii, domicelli defuncti, ex parte una, et
domum Johannis Gasqueti ex altera ... Datum die Martis post festum beate Mathie
apostoli. Anno Domini m° ccc°
xxx° quinto... .(Arch. de Pau.)
Du 12 mars 1353,
affièvement d'une maison dans le faubourg de Nontron :
« Nous, Jehan de Montbourchier, chevalier, seneschal
et gouverneur du vicomte de Lymoges pour le duc de Bretagne, vicomte de
Lymoges... Considérant que par longtemps avoit
este en la main de monseigneur une maison size au barriz de Nontron, qui jadis fut de Guy de Montfrebouffier,
et size entre la meson Guy d'Aye d'une part, et la meson Penol de Beaudeans,
daultre, laquelle meson souleit tenu au nom de monseigneur Pierre Colobel, lors
prevost de Nontron, combien la dite meson se passiet, tant en fonz, cortilh,
murailles et autres ediffices et exues que en toutes autres chouses sans que
monseigneur en eust prouffit, combien que par longtemps eust ete bani et
puplie... se il y avoit aucuns qui vouleissent aucunes choses donner en celle
meson et nulz ne se fussent offertz a donner en plus de vingt escuz pour
entrailles et cinq souz de rente... Et nous, au nom de monseigneur, fussions
tenus a Geoffroy dou Boays en grand some par raison de la garde dou chasteau de
Nontron dou temps passe, avons baille... perpétuel héritage... au dict Geoffroy
la dicte meson, ensemble le fonz, propriété, ediffices, exues et le cortilh...
en par luy paiant cinq soulz de annuel au terme de la St-Michiel, et deux
deniers de acaptes en mutation de seignor... Donné le... » (Archives des
Basses-Pyrénées.)
« En 1388, arrentement par Alain de Monterfils,
receveur du vicomte de Limoges, à maistre Pierre de Lestrade, chapellain de
Saint-Priest (Petro de Lastrada, capellano sancti Perreti), d'une maison sise au faubourg de Nontron, pour 24
sols outre la rente ancienne. Die Martis post Oculi mei an° Domini m° trecentesimo
octogesimo octavo. »
(Doat.)
« Du 23e de febvrier 1535, reconnaissance de
six sols de rente en faveur de Jehan Pastoureau, marchand, habitant de la dite
ville de Nontron, tant pour luy que pour et au nom de honorable homme maistre
François Pastoureau, prestre abbé de Blanzac... sur une maison et jardin estant
darnier icelle, assise en la présent ville, confrontant par le devant avecque
la rue publique par laquelle lon va du pont du Barry au grand cimetière de
Sainct-Mathurin de Nontron. » Signé : Texier, notaire.
Il résulte aussi
de ce dernier titre que le nouveau quartier avait été construit bien avant le
XVe siècle, ce qui avait nécessité ailleurs le transfert du premier
cimetière, dont nous avons parlé au cimetière Saint-Mathurin, dont nous
reparlerons.
« Du 3 avril 1583, reconnaissance de quinze
deniers de rente en faveur de François de Conan, escuyer, sur une maison assise
en la ville de Nontron, confrontant par le devant avec la grande rue appelée de
la Cahue. Signé : Fonreau, notaire. »
« Du 11 juillet 1583, devant Agard, notaire, hommage
au roy de Navarre, par maistre Guilhaume Faure, escuyer, a raison dune maison seize
en la grande ruhe, confronte avec la maison de maistre Jehan de La-brousse,
juge des paroisses distraictes... avec la dicte ruhe par le devant et par le
darnier aux fossés de la dicte ville, ensemble un jardin dernier la dicte
maison, sous les fossés. »
« Du 15 novembre 1610, reconnaissance en faveur de
François de Conan, de quinze deniers de rente sur une maison dans la grande me,
sur main droite en allant du chasteau a la Cahiol... consentie par M. Guilhaume
Ribadeau, avocat en la cour du Parlement de Bordeaux, devant Faure, notaire. »
Du 25 septembre 1775, devant Labat, notaire,
reconnaissance de quinze deniers de rente en faveur de messire Alexis de Conan,
chevalier, sur une maison, cour, écurie ou grange, se tenant dans la grande
rue, confrontant du levant à un jardin, du couchant à la dite grande rue qui va
de l'église de Saint-Sauveur à celle de Saint-Etienne, sur la gauche... »
2° Place de la
Cahue. -
Cette place a dû évidemment son nom à l'existence de la halle, construite par les
moines de Charroux sur l'emplacement où s'élève l'hôtel-de-ville actuel ; car,
dit le dictionnaire de Bescherelle, le mot cohue, tiré du celte,
signifie halle, marché, lieu où se tenaient les plaids et les autres réunions
publiques. Ce fut, autrefois, le forum nontronnais où se traitaient et se
délibéraient toutes les affaires concernant la communauté, ainsi que nous le
constaterons plus loin. En attendant, voici quelques autres extraits d'actes
concernant cette place et la porte Limousine qui la clôturait au nord.
Du
24 août 1474 :
« Nos custos
sigilli... Prudente viro Petro Pastorelli, burgensi ville Nontronij... non
cohactus, non seductus ... assensavit et arrentavit, cessit et diraisit
perpetuo et ad amphytheosim perpetuant... Johanne Peyrot... videlicet quosdam
parietes olim domus sitam in suburbiis ville predicte Nontronij et ante Cahuam
dicti suburbu prout confrontati cum parietibus Pasqueti de Born ex una parte,
et cum parietibus olim Fentif Binem ex parte alia, et cum muralhia dicti
suburbii ex parte altera, et cum placea publica qua est ante dictam Cahuam ex
parte reliqua... Sub et pro anno redditu seu annali pensione quadragentis
solidis monete currente... Datum in ville Nontronij... L. de Charlangi,
R ».
Du
7 avril 1500 :
« Nos custos... Johannes Baret, non cohactus, non
seductus... Vendidit... prudente viro Johanne Pastourelli junior mercatore
ville Nontronij... Videlicet quinque decim solidos renduales... quos ipse Baret
venditor a dicto Pastourelli emptore assedit et assignavit perpetuo et anno
quolibet in et super omnibus et singulis bonis... et specialiter et expresse
super unam domum habitationis sitam in ville Nontronij et prope portalis
Lemovisini tenente cum hospitali de Nontronio. Item ulterius super quodam aliam
domum sitam prope dicti portalis tenente cum domo Janeti de La Colarie et cum
domo Petri Dantriaut, quodam carreolo intermedio... Datum et actum Nontronio...
P. de Damailhaco, R. »
Tel était, vers
la fin du XIIe siècle, l'état des trois premiers groupes de la ville
de Nontron lorsqu'elle fut prise d'assaut et saccagée, en 1191 et 1199, par les
troupes anglaises de Richard Cœur-de-Lion, guerroyant contre le vicomte de
Limoges, auquel les moines de Charroux, trop faibles pour défendre cette ville,
en avaient fait, depuis peu, cession sous la réserve de l'hommage. De 1200 à
1208, le vicomte de Limoges en releva les fortifications et y annexa le
quatrième groupe suivant, composé d'habitations groupées sur les côtés et au
chevet de l'église de St-Sauveur.
Quatrième
groupe.
1° Au
côté sud de l'église de St-Sauveur et au-dessous des dépendances du couvent,
existait et existe encore une rue tortueuse et étroite, quoique élargie sur
certains points, partant de la Grand'Rue et aboutissant, après un parcours de
cinquante mètres environ, au petit cimetière contournant le chevet de ladite
église. La rue y était barrée par une porte dont les derniers vestiges ont
disparu en 1883, par suite du recul d'une maison formant un angle rentrant
pouvant servir d'abri en cas d'attaque. Elle était, en outre, protégée, d'un
côté, par ses jardins en terrasses dominant encore le vallon du Bandiat, et de
l'autre côté par les constructions et les jardins, clos de murs, du couvent et
de cinq maisons de la Grand'Rue, et aussi par la tour du clocher de l'église.
Cette rue,
composée primitivement de douze habitations, portait autrefois le nom de rue
Chantemiolo, ou du Cimetière, ainsi qu'il résulte de divers actes de rente,
savoir :
« Des 21, 24 et 27 février 1509, devant Nicoine,
notaire, reconnaissances de rentes en faveur de M. de
Colonges, baron de Nontron, sur trois maisons et un jardin dans la rue
Chantemiolot ou du Cimetière ».
« Du 25 juin 1542, acte d'accensement consenti par
le sieur Vieillemard, marchand, en faveur de Pierre Bayet, de vingt sols de
rente sur une maison rue Chantemiolo ».
« Du 24 janvier 1796,
devant Boyer, notaire, vente à Pierre Grolhier-Desbrousses, d'une partie de
grange, située rue Chantemiaule de Nontron, confrontant …. à la rue sur main gauche, en allant à une
ci-devant chapelle appelée Notre-Dame-des-Clercs. »
Plus tard, on
lui donna le nom de rue des Cordiers, parce qu'il y existait une fabrique de
cordes. Aujourd'hui, on la confond le plus souvent avec la rue Notre-Dame, dont
elle n'est que le prolongement jusqu'à la Grand'Rue.
2° Rue des
Theveneix, débouchant à l'angle nord-est de la place de la Cahue, formant
équerre et angle droit par le milieu, d'où elle descend au-delà du chevet de
ladite église et du petit cimetière jusqu'à la rue Saint-Sauveur, d'après les
actes suivants :
« Du 6 mai 1496, reconnaissance de rente en faveur
d'Alzias Flamen, seigneur de Romain et de Saint-Laurent, sur une maison rue des
Theveneix. Signé Podio Renerii. ,
« Des 25 et 27 février 1519, devant Nicoine,
notaire, reconnaissances en faveur de M.
de Colonges, sur deux
maisons rue des Thevenets. »
« Du 24 juin 1532, devant Texier, notaire,
reconnaissance en faveur de Jehan Pastoureau, marchand de Nontron, tant pour
luy que pour vénérable François Pastoureau, prestre, abbé de Blanzac, son
frère, de troys sols quatre deniers tournois, de cens et rente annuelle et
perpétuelle.... pour raison et cause d'une maison assise en la ville de Nontron
et en la rue appelée deux Esteveneix.... »
« Du
24 avril 1681, devant Agard, reconnaissance en faveur de M, de Pompadour,
seigneur de Nontron, sur une maison rue des Thevenets. »
« Du 31 décembre 1775, devant Labat, notaire,
reconnaissance de dix sous de rente, en faveur de M. Alexis de Conan, par Jean
Thevenet, cordonnier, sur une maison dans la rue des Estheveneix, conformément
à la reconnaissance faite le 12 juin 1584, en faveur de maître Thibeau
Pastoureau, seigneur de Lagrange, renouvellant elle-même celle ci-dessus du 24
juin 1532.... »
Cette dernière
maison est, d'après les confrontations, celle qui, placée à l'un des côtés du
sommet de l'angle, fait face à la partie de rue descendant vers celle de
Saint-Sauveur.
Le nom de
Theveneix lui fut probablement donné par la famille qui y fit élever la
première construction, ou qui en fournit le terrain, et de laquelle descendait,
peut-être, le Jean Thevenet de 1775, dont la famille n'a disparu de Nontron que
vers 1830. Mais pourquoi avait-on, au commencement de ce siècle, remplacé
l'ancien nom par celui de Rue-Brune ? Parce que, sans doute, cette rue étant,
dans une partie, la plus étroite de celles de la ville, elle est la moins
visitée par le soleil et la moins éclairée ?
3° Rue Saint-Sauveur, indiquée sous ce
nom dans les actes des XVIe et XVIIIe siècles; mais,
auparavant, sous celui de chemin ou rue du Cimetière avec lequel elle se
confondait. Elle faisait suite à celle de Chantemiolo jusqu'à la rue des
Theveneix et formait ainsi un quadrilatère, clos par une porte, dont une pierre
du cintre se voit encore dans le mur de façade de la deuxième maison à gauche,
en allant à 1’église Notre-Dame. L'autre partie de ce
cintre s'appuyait au coin d'une maison en saillie, formant un angle de
retraite, et reconstruite en recul il y a quelques années.
La rue
Saint-Sauveur est d'ailleurs, également confondue avec celle de Notre-Dame,
venue plus tard et dont nous reparlerons, car, pour suivre l'ordre
chronologique, force nous est de passer de la ville-haute à la basse-ville,
construite du XIIe au XVe siècle, à l'abri et sous les
fortifications de la première.
Cinquième
groupe.
Ce groupe, en
remontant du sud au nord, comprend : 1° La rue Basse-du-Rieu ; 2° la place du
Marchadieu ou du Canton ; 3° la rue du Peyras ; 4° la rue du Rieu prolongée ou
des Arceaux; 5° et le Grand-Puy-de-Bayet.
Pendant que la
haute-ville se développait sur le sommet de la colline et pendant le temps de
paix relative qui régna du XIIIe au XIVe
siècle, avant la guerre de Cent ans, commencée en 1337, des constructions
s'élevèrent dans la gorge à l'ouest, sur les bords du ruisseau, au-dessous et
sous la protection des remparts de la forteresse, du Bragier et du castrum, ce
qui forma la rue Basse-du-Rieu. Le côté droit dut être construit le premier ;
mais la création, en 1267, d'un couvent de Cordeliers, établi au sommet de la
colline, de l'autre côté de la gorge, donna une impulsion plus grande à ces
constructions. Le côté gauche de la rue du Rieu fut garni de maisons. La place
triangulaire du Marchadieu fut créée ainsi que la rue partant du sommet et
conduisant au couvent; la prolongation de la rue du Rieu fut commencée, et le
tout fut relié à la haute ville par la prolongation de la rue du
Grand-Puy-de-Bayet à partir du fossé jusqu'au Marchadieu. Cette partie de la
basse-ville fut enfin close : au midi, par le portail de Gouffard ou du
Verrier, vers les deux tiers de la rue actuelle, à 150 mètres environ
au-dessous du sentier débouchant du fossé nord de la forteresse ; à l'ouest et
aux Peyras, par le portail des Cordeliers ; au nord, par le portail des
Etanches, à 30 mètres environ avant la rue du Petit-Puy-de-Bayet. Quant aux
autres défenses, ce groupe était, comme nous l'avons dit, protégé à l'est par
les fortifications de la haute-ville, et, à l'ouest, par des basses-cours,
closes de murs, larges et profondes, dans lesquelles il devait être périlleux
de descendre pour pénétrer dans les réduits obscurs du rez-de-chaussée. C'est
ce qui résulte de l'état des lieux et des documents suivants :
1° Bue
Basse-du-Rieu, sous les murs de la forteresse et du castrum.
Le premier faubourg
de Nontron ayant été englobé dans la haute-ville, la rue Basse-du-Rieu fut
d'abord qualifiée de Barri et en portait encore le nom au XVe
siècle, ainsi :
« Du 15 janvier 1430, échange faict entre Eymeric
Patoureau et Pierre Patoureau, consorts, et Giraud Esport, par lequel lesdicts
Patoureau ont donné au dict Esport certains jardins appelez au territoire de
Nontron confrontant.... et du coste bas au chemin publiq qu'on va vers la font
de Saint-Pierre, mouvant de la directite du prieur de Nontron ; et en contre
échange ledict Esport a donne auxdicts Pastoureau la moytie dune maison seize
au Barry, fort de Nontron... confronte.... par devant, au chemin publiq quon va
de la porte du Barry vers la maison de Jean Patoureau et de par derrière a
certains centiers allant à la maison des Larty.... De la fondalite du seigneur
de la Beytour, sous la rente de dix-huit deniers. Signé : de Poyalibus. »
« Du 23 mai 1438, échange faict entre Etienne Dupuy
et Jean Ribadeau, par lequel Dupuy donne audict Ribadeau certaines maisons
scises au Barry, fort de Nontron, confrontant.... au chemin publiq qui sen va
de la porte de Rascot vers le treuil de Pierre et Aymeric Patoureau, et du cote
de derrière au mur dudict lieu de Nontron, de la fondalite du seigneur vicomte
de Limoges, a quatre deniers de rente. En contre échange, ledict Ribadeau donne
audict Dupuy certaine maison seize a Nontron, confrontant.... au chemin publiq
quon va de la maison de Jean Ribadeau vers la porte du Barry, de la mouvance du
seigneur de la Beytour, sous la rente de deux deniers. Signé : de Poyalibus. »
« Du 22 septembre 1775, devant Laba, notaire,
reconnaissance par la famille Ribadeau en faveur de messire Alexis de Conan,
sur les maisons ci-dessus, savoir : Deux petites maisons attenantes lune et lautre
seizes et situées dans la présente ville de Nontron et dans la rue appelée du
Rieu, ensemble un petit jardin par le derrière, lesquelles maisons se
confrontent du coté du levant a la rue par laquelle l'on va de la place appelée
Canton a Saint-Martial-de-Valette sur main droite, a deux autres maisons, et au
couchant au pré des pères Cordeliers... sous la rente de vingt deniers....
conformément aux anciens titres.... l'un du 15 janvier 1430 portant le devoir
de 18 deniers de renie, et lautre du 23 may 1438 portant deux deniers de rente
dus au seigneur de la Beylour, de qui le seigneur comte de Conan a droit et cause. .. »
A la fin du XVe
siècle, le faubourg fait place à la rue du Rieu Merdanson, qualification
peu poétique, employée dès le XIIIe siècle,
d'après le procès-verbal de la séance du 29 août 1882 de la Société
archéologique et historique du Limousin, où nous lisons, à propos de déblais
exécutés dans la ville de Limoges, et la découverte d'un égoût à ciel ouvert :
« Après avoir élé le ruisseau du Joumard, il devint
le Merdanson. Ce nom est en usage dès la fin du XIIIe siècle ou les premières
années du XIVe, et la dénomination est donnée dans d'autres villes à des égouts
établis dans des conditions analogues. .
Du
26 mai 1500 :
« Nos custos …
personnaliter constitutis probo viro Helio de La Roussie ville Nontronij …. Et
prudente Johanne Pastorelli mercatore de Nontronio …. predictus de La Roussie
vendidit, cessit.... ejusdem Pastourelli.... » Huit sous de rente pour le prix
de six livres payées au vendeur « tam in auro quam in moneta alba bene
numerata... » pour garantie de quoi le vendeur hypothèque tous ses biens
présents et à venir : « Et expresse sub suis duobus domibus et viridis
adjunctis siti in ville Nontronij et in rua rivi de Merdanson, confrontati a
parte ante cum dicta rua et a parte retro cum fossato predicte ville Nontronij
ab uno latere cum domo Merigoti de La Roussie et ab alio latere cum domo
Johannis de La Boussarie....; Datum et actum Nontronij, die Veneris vicesima
sexta mensis maij. an° Di M° quinquagesimo... De Domailhaco R... »
Du
28 juin 1505:
« Prudente viro Johanne Pastourelli junior...
assensavit.... Petro de Massalabe chapellario.... quondam domum sitam in ville
Nontronij et in rua rivi de Merdanson confrontatam a parte ante cum dicta rua a
parte retro cum fossato ville ab uno latere cum quodam pleyduram Johannis
Mosnier cordonario et ab alio latere cum pertinentiis de Bernardi de La
Posge.... sub censu decim solidos.... Signé : P. de Domailhaco. »
Du 3 juin 1568,
devant Laud, notaire, acte récognitif de huit deniers de rente consentie :
« En faveur de
Geauffroys Dubarry, escuier, seigneur de Puycheny et d'Eyport, par Jehan
Tamisier, bouchier...., sur une maison seize en la ville de Nontron et en la
rue basse dicelle appelée la rue du Rieu-Merdanson, par laquelle on vat de la
porte Rascot a la Croix-Mercier et dillec au bourg de Saint-Martial-de-Valette,
d'autre avec le portail du Verrier.... La dicte maison et vergier jouignant a
icelle et par le dernier dicelle aregardant sur les murailhes de
la dicte ville mouvant et pendant du fief noble d'Eyport.... »
Des années 1593,
22 janvier 1658 et 14 janvier 1753,
reconnaissances successives de dix-neuf sols huit deniers de rentes, devant Mes
de Monsalard, Mestayer et Boyer, notaires, consenties par divers en faveur des
seigneurs de Montcheuil (Bertrand Audier, Armand d'Aydie et Jean-Jacques
Beaupoil de Saint-Aulaire), ladite rente renouvelée devant Boyer, notaire, le
25 janvier 1776, en faveur de M. Moreau de Villejalet, dernier seigneur de
Montcheuil par Léonarde Cahuet et Thomas Martin, son fils, sur :
« Une maison et jardin au derrière, situés dans la
rue Basse-du-Rieux et joignant la porte du Verrier, anciennement appelée la
porte de Gouffard, sy confronte.... par le devant à ladite rue qu'on va du
canton audit portail du Verrier, par le derrière aux murs de la dite ville....
»
«Du 18 décembre 1598, devant Laud, notaire,
reconnaissance de rente en faveur de M. de Beynac, seigneur de Lavallade, sur
une maison à Nontron, rue du Rieu. »
« Du 21 mai 1614, devant Blois, notaire,
reconnaissance en faveur de M. César de Réals, conseiller au présidial de
Périgueux, sur une maison rue du Rieu. »
Du 12 décembre 1649, devant Peyrot, notaire, vente
par Jean de Basset, avocat, d'une maison située en la rue Basse-du-Rieu et sise
sur le ruisseau appelé le Merdanson, confrontant, par le devant, à ladite rue,
par le haut, au pré des Cordeliers de Saint-François... »
« Du 8 septembre
1664, devant Agard, notaire, vente à François Pastoureau, notaire royal, dune
maison : « sise dans la ruhe Basse, par laquelle lon vat de la place du Canton
au portail du Verrier.... »
« Du 1er mai 1671, échange de la maison ci dessus contre
une autre maison avec grange derrière et jardin joignant le ruisseau appelé le
Merdanson, le tout situé rue Basse appelée du Rieux, sur ledit ruisseau.... »
«
Du 13 mars 1740, devant
Grolhier, notaire, vente par la veuve Agard à Elie Brandy : « d'une maison à
Nontron rue du Merdanson, confrontant par le devant à ladite rue en descendant
de la place du Canton vers le faubourg de Salamont sur main droite, sous la
censive de Mme de Courcillon.... »
Du 29 février
1758, devant Boyer, notoire, reconnaissance par Jeanne Boyer à M. Jean-Charles
de Lavie sur :
« Trois
maisons situées à Nontron dans la rue Basse, confrontant du côté du couchant à
ladite rue par laquelle lon vat de la place du Canton au faubourg de
Salomon.... pour la première, argent deux sols six deniers de rente.... pour la
seconde maison et petit jardin, argent six deniers, et pour la troisième et son
jardin, argent trois deniers de même rente payable et portable annuellement au
château ou hôtel dudit seigneur de Lavie, scis en ladite ville de Nontron, a
chaque jour et teste de la Noël. En outre, le droit d'acapte à muance de
seigneur, et de faire faire la garde une fois le mois seulement pour les deux
premières maisons. Le tout ainsi et de même qu'il est porté par les anciennes
baillettes et reconnaissance du dixième may 1583 et 31 janvier 1658, signées
Agard et Vielhemard, notaires.... »
2° Place du
Marchadieu ou du Canton. — Dont le premier nom est dû au marché qui
se tenait autrefois dans ce lieu et où il fut maintenu, en partie, jusqu'en
1837, époque de la création au nord du champ de foire actuel. Le nom de Canton
ne lui fut donné que vers le commencement du XVIe siècle, par suite
de la réunion, sur cette place triangulaire, de la rue d'aux Peyras au sommet
de l'angle ouest ; de la rue du Rieu-Merdanson, à l'angle sud-est; de la rue du
Rieu prolongée, ou des Arceaux, à l'angle nord-est ; et de la rue du
Grand-Puy-de-Bayet à l'est. Voici, par extraits, quelques titres à ce sujet :
Du 22 novembre
1487, assence par Jean Pastoureau jeune à Hélie de Pauillac, sur les ruines
d'une maison sise à Nontron, dans le chemin qui du Marchadieu conduit à la
fontaine Saint-Pierre :
«
Cum itinere quo itur de Mercadillo versus
fontem sancti Petri. »
Du 28 février
1515, .devant Puyzillou, notaire, échange entre :
« Honorable personne maistre François et Jean
Pastoureau frères, demeurant en la ville de Nontron.... et Jehan Colys.... Les
dicts Pastoureau ont eschangé et délaissé audict Colys sçavoir : est une vigne
au Mas de Laubart, confrontant avecque le chemyn par ou l'on va de la Croix du
Peyrat vers le Marchedieu de Nontron.... »
Du 5 février
1530, devant Tessier, notaire, reconnaissance de trois sols de rente par Jean
Bouyer, hoste, en faveur de :
« Jean
Pastoureau, marchand, tant pour luy que pour et au nom de vénérable personne
François Pastoureau, prestre, abbé de Blanzac, sçavoir est une maison située en
la ville de Nontron, confrontant,... par le devant avec la place publique
appelée le Marchadieu… ».
Du 6 janvier
1532, reconnaissance de vingt deniers de rente en faveur des mêmes sur :
« Une vigne sise près le Treuil appelé de Mouny,
laquelle se confronte avec le chemin quon va du Marchadieu de Nontron au Mas du
Puy-de-Flori. »
3° Rue des Pères Cordeliers, en patois d'Aux Peyras, au couvent desquels elle conduisait.
Du 25 septembre
1740, devant Grolhier, notaire, verbal au requis de Jean Eyssandier, sur une
maison de la rue communément appelée des Cordeliers.
Du 4 août 1742, même
notaire, vente d'une maison dans la rue des Cordeliers, allant de la place du
Canton au couvent.
Cette rue était,
comme nous l'avons dit, fermée, à son extrémité, par un portail dit des
Cordeliers.
Du 2 novembre 1717,
devant Quilhat, notaire, vente par Antoine Fanty, sieur de Lescure, d'une terre
aux environs de Nontron, appelée de Laubard, confrontant au chemin qui va de
ladite ville par le portail des Cordeliers au lieu des Granges.
Du 25 janvier
1776, devant Boyer, notaire, reconnaissance de deux sols six deniers de rente :
«
En faveur de Mme Marie de
Marcillac, veuve de messire Thibaud Moreau, chevalier, seigneur de Villejalet,
Saint-Martial-de-Valette, baron de Montcheuil et autres places, habitant en sa
maison noble de Saint-Martial-de-Valette, sur une pièce de vigne appelée à la
Croix-de-Toupriant.... confrontant au chemin qui va du portail des Cordeliers
au bourg de Saint-Martial… »
4° Rue du
Grand-Puy-de-Bayet. - Nous avons déjà dit que la moitié
environ de cette rue avait été comprise dans la ville-haute ou vieille-ville ; mais lorsque de cette ville le marché
fut transféré au Marchadieu , dont nous venons de parler, la partie du
Puy-de-Bayet, au-dessous des fossés, se revêtit de maisons, dont la dernière,
adroite en débouchant, forma le coin de la rue des Etanches, ou du Rieu
prolongée, ainsi qu'il résulte d'un acte de 1487, d'après lequel
cette dernière rue n'était qu'un chemin à cette époque.
Du 7 novembre
1487, vente par Jean de Paulhac à Jean Pastoureau de la quatrième partie d'un
emplacement dans la rue de Bayet :
« Discreto viro Johanne de Paulhac, presbitero loci
de Ribeyrolas, parochie Sancti Martini picti.... vendidit.... discreto viro
Johanne Pastourelli junior, mercator de Nontronii.... Videlicet quartem partem
quande platee seu sole.... sitam in rua de Bayet, confrontatam
cum rua predicta ab ante et de dicta rua tenendendo et vertendo versus fontem Sancti Petri et ab alia parte cum platea Geraldi de Paulhiac et a
parte retro cum Bernardo de Mondinaud quodo charreyra inter medio... Sub censu
seu annali pensionne tres obolas monete currente domino priore de Nontronio
solvendi in quolibet festo nativitatis domini Jesus Christi et cum pretio seu
summa duodecim libras monete currente qua summa dictus Johanne Pastourelli.... realisit,
tradidit tam in bono auro quam in bona moneta alba.... Datum et actum in villa de Nontronio presentibus
ibidem et audienlibus domino Johanne de Chabas, presbitero. et Jehan Yon,
chapellario, testibus ... Die septima mensis novembris an° di m°
quadragesimo octuogesimo septimo. Signé : Deyse R. »
Du 22 novembre
1487, bail à cens par ledit Pastoureau à Helie de Paulhac, de l'immeuble acquis
par l'acte qui précède et y désigné ainsi qu'il suit :
« Videlicet quartem partem quodam parietum olim
domum situm in vetere ville Nontronii in carreria indicata deu Puey de Bayet,
quam acquisivit de Johanne de Paulhaco, presbitero... confrontatam a parte ante
cum predicta carreria et a parte latere cum itinere quo itur de Mercadillo
ville predicte versus fontem sancti Petri et ab alio latere cum domo magistri
Petri de Podio Reynerii et a parte retro cura viridario Johannis de Mondinaud
quodam carreriolo inter duo.... Sub et pro anno redditu seu annali pentione
quindecim solidos... et una gallina.... Probis viris Stephano de Rousseau et
Martiale Robini habitatores ville Nontronii testibus... Signé Radulphi R. »
Ce dernier acte
fut suivi de deux autres reconnaissances, la première du 3 mai 1582, devant
Lenoble, notaire, consentie en faveur de :
« Maistre
Thibaud Pastoureau, lieutenant au dict Nontron, y habitant, par Jehan Sauvaige,
maistre cuysinier, habitant en ladite ville. — La seconde du 27 décembre 1775,
reçue Laba, notaire, consentie à messire Alexis de Conan sur : « Une maison
sise dans la rue appelée au Grand-Puy-de-Bayet, faisant coin à autre rue
appelée au Merdanson, confrontant du levant à un emplacement de maison actuellement en basse-cour
appartenant à M. de Mazerat, avocat, du midy à la rue dudit Grand-Puy-de-Bayet,
du couchant à la rue par laquelle l'on va de la place du Canton aux Etanches
sur main droite et du nord à antre maison. »
Du 29 décembre
1562, devant Thevenet, notaire, vente audit M. Thibaud Pastoureau par :
« Hélie Robin, marchand, demeurant en la ville
de Cougnac, fils a feu maistre François Robin, en son vivant juge-général pour
le roy de Navarre aux comte de Périgort et viscomte de Limoges, de trois
deniers de rente foncière sur une maison assise en la presant ville de Nontron
et sur la rue du Puy-de-Bayet, confrontant une autre maison appartenant a Binle
de Vaulx et avec la maison de maistre Jehan Texier, sergent royal, pour le prix
et somme de douze escuts, réellement bailhes et payes par ledict Pastoureau au
dict Robin, par huit escuts dor et le restant en testons et autre bonne monnaye
ayant courts.... »
Ces maisons et
emplacements étaient situés au-dessous du fossé de la ville-haute et à droite
en descendant au Marchadieu ou Canton. Le côté gauche, alors sans construction,
se terminait en pente raide jusqu'à la place du Fort et la maison forte d'Espor
qui dominait et défendait le Marchadieu et l'entrée des rues adjacentes, parmi
lesquelles se trouvait la rue des Etanches dont nous allons parler.
5° Rue du Rieu prolongée, puis des Etanches et, plus tard, des Arceaux : Nous avons déjà
vu, dans l'acte du 22 novembre 1487, que cette rue n'était alors qu'un chemin
conduisant à la fontaine Saint-Pierre, cum itinere quo itur de
Mercadillo versus fontem Sancti Petri ; laquelle fontaine existe encore dans un
ancien chemin, à quatre cents mètres environ à partir de la place du Canton, et
forme la source principale du ruisseau Merdanson. Mais, en 1514, ce chemin est
qualifié de rue publique, ainsi qu'il suit :
Du
9 janvier 1514, devant Tessier, notaire :
« Etablissement
d'une rente annuelle et perpétuelle de vingt sols faille par Laurent Fantif, de
la ville de Nontron, en faveur de honneste femme Manette Régis, veuve de Jean
Pastoureau jeune, dit Capduc, lorsqu'il vivoit, marchand de ladite ville,
légitime administratrice de François, Jean et Estienne Pastoureau leurs fils,
sur la maison dudit Fantif, sittuee dans la rue publique qui vat du Marchedieu
de Nontron a la fontaine Saint-Pierre sur le devant, et par le derrière avec
les fosses de ladite ville et avec la maison de Eymery de Charlange, et avec la
maison de François de Pauillac. Domum sitam in rua publica qua itur de Mercadillo de
Nontronio ad fontem Sancti Petri, a parte ante et a parte retro cum fossati
ville de Nontronij.... »
Du 25 avril
1747, devant Petit de Cheyllac, notaire, reconnaissance de quatre deniers de
rente, consentie en faveur de M. Louis-Thomas de Conan, par la veuve de
François Bosselut, sur :
« Une maison haut et bas avec un jardin par le dernier,
située dans la présente ville, rue du Rieu, confrontant a la ditte rue en
allant du Canton aux Etanches sur main droite, par cotté la maison et coudert
de Germain Bosselut, sieur de La Borie, par autre cotté, aux mazures et jardin
d'Antoine Delapouge, et par le dernier aux fossés de la ditte ville....
conformément a la reconnaissance du 31 juin 1614, reçue Fonreau, notaire.... »
Du 20 septembre
1775, devant Labat, notaire, reconnaissance de quatre deniers de rente
consentie par Pierre Ratineau en faveur de M. Alexis de Conan sur :
« Une petite maison avec un petit jardin par le
derrière, située sur la rue du Rieu autrement Merdanson, laquelle se confronte
du cotté du levant aux fossés de la ville, du midy a autre maison dudit
Ratineau, du couchant a la rue par laquelle Ion va de la place du Canton aux
Etanches sur main droite, et du nord, au jardin où était jadis une maison
appartenant à M. Labrousse de Bosfrand.... »
Il résulte donc,
des titres qui précèdent, que le côté droit de cette rue fut construit au XVe
siècle. Le côté gauche nous parait l'avoir été plus tard, bien que Candale, qui
s'empara de Nontron en 1488, y eut, d'après la tradition, fait construire,
quelque temps après, une maison qui existe encore et dont la façade est ornée
de sculptures de l'époque de la Renaissance. — Dans l'une des chambres de cette
maison se trouve aussi, sculptée en saillie, au milieu de la cheminée, une tête
en pierre que l'on dit être le portrait dudit Candale.
Enfin, cette rue
était close, à son extrémité nord, à environ vingt mètres avant le
Petit-Puy-de-Bayet, et à l'angle d'une partie de la maison de Candale, faisant
saillie sur ce point, par une porte dite Portail-des-Etanches, d'après un acte
du 22 janvier 1587, reçu Fonreau, notaire, portant vente : « D'une maison au
Portail-des-Etanches, relevant de M. Guillaume Faure, sieur de La Mothe,
seigneur de Nontron. »
Cette rue tira
son nom : Des Etanches, de barrages faits sur le ruisseau pour le service des
tanneries ; et, lorsqu'au XVIIIe siècle, ce ruisseau fut couvert par
des voûtes en pierre, on lui substitua celui : Des Arceaux.
Pendant que la
ville basse se complétait ainsi, la ville haute se développait également, vers
la même époque, par le prolongement, à l'est, du chemin conduisant au grand
cimetière Saint-Mathurin, ce qui forma la rue dite du Cimetière, et, plus tard,
de Notre-Dame, dont nous allons parler.
Sixième
groupe.
6° Rue du Cimetière ou de Notre-Dame.- Qualifiée encore de chemin vers la fin du XVe
siècle, d'après l'acte suivant, portant vente à Dauphin Pastoureau, par les
conjoints Mautrot, de treize sous de rente sur un jardin dans l'ancienne ville,
confrontant avec le chemin allant de Nontron vers Saint-Mathurin.
Du
10 décembre 1479 :
« Honestis viri Johanne Mautrot dictus Bolz, et
Margarita de Rivalibus... Vendiderunt... prudente viro Delphino Pastourelli,
mercatore de Nontronio, Videlicet tredecim solidos censuales.... in et super
Colino Fantif, causa et ratione assense perpetue dicti Colini Fantif facte...
viridarij siti in vetere ville de Nontronio confrontati cum itinere quo itur de
Nontronio versus sanctum Mathurinum ex parte ante et cum viridario Petri Regis
ex parte alia et cum viridario venditoris ex parte altera.... Signé : Podio
Renerij-R. »
Mais, avant le
XVIIe siècle, cette rue, qui continuait celles de Chantemiolot et de
Saint-Sauveur, prend le nom de rue du Cimetière, ainsi qu'il résulte des actes
suivants, où il est question de maisons construites bien antérieurement :
« Du 8 juillet 1618, reçu Mercier, notaire,
vente par Aron Roy à Léonard Roy, de deux sols six deniers de rente due par
maître Charles Mondinaud, a cause dune cheneviere et plassage de maison près la
rue du Simettiere. »
« Du 17 mai 1653, devant Fougière, notaire,
reconnaissance de rente par François Arbonneau, en faveur de M. César deReals,
sur une maison, jardin, cheneviere et pré au derrière, rue du
Simettiere ».
« Du 20 mars 1638, devant Vielhemard, notaire
en la ville de Nontron, et dans le chasteau du seigneur de la dite ville...
Reconnaissance de douze deniers de rente consentie en faveur de messire
Philibert-Hélie de Pompadour, seigneur de Nontron, par Pierre Rastineau,
acquéreur de Mery Dudouble, maistre maréchal, sur une maison sise et située au
Simintiere de cette ville, confrontant, d'un coste, au portail de la dite
ville, appelé le Portal du Simintiere, et par le devant a la grande rue allant
au dit Simentiere sur main droite et daultre au dit Simintiere... avec les
droits dacaptement et de tailhe aux quatre cas acoustume et ainsi quil est
contenu dans les antiennes bailhettes... »
Cette maison est
l'avant-dernière à droite en allant à l'église Notre-Dame, alors contiguë au
cimetière St-Mathurin, et il en résulte qu'avant le XVIIe siècle la
rue était close sur ce point et construite en entier.
« Du 7 mai 1676, devant Mazières, notaire,
échange de deux maisons situées à Nontron, rue du Simintiere, entre MM. Pierre
de Montozon et Charles Feuillade. La maison reçue par celui-ci, joint, est-il
dit, par le derrière, au grand Simintiere. »
Du 19 juillet
1736, vente par M. Albert, curé de Nontron, d'une maison sise rue du Cimetière,
ayant une porte sur le cimetière et joignant la maison de M. Feuillade.
Quelques années
après, la rue prit définitivement le nom de rue Notre-Dame, parce qu'elle
conduisait à l'église de ce nom. Nous disons définitivement, parce que, dans
quelques actes antérieurs, on avait commencé à changer le premier nom, ainsi
qu'il résulte d'un acte, reçu Basset, notaire, par lequel Vincent Perry
consentait, en faveur de Mme Antoinette de Camain, épouse du
seigneur de Lavie, une reconnaissance de rente sur une maison et un jardin, rue
Mesdames,
nom
dérivé, sans doute, de la récente chapelle de Notre-Dame-des-Clercs et de
l'ancien sanctuaire de Notre-Dame-de-Pitié dans le cimetière.
« Du 14 avril 1746, devant Grolhier, notaire, bail à
ferme par Cholet à
Joseph-André, brigadier
de la maréchaussée de Nontron, d'une maison dans la rue Notre-Dame. »
Du 28 septembre
1772, vente de la maison, désignée dans l'acte de 1736, située, est-il dit,
dans la rue Notre-Dame et joignant par derrière le cimetière Saint-Mathurin.
Enfin et dans un
acte de 1779, on donne le nom de Portail Notre-Dame au portail dénommé du
Simintiere dans l'acte ci-dessus de 1658. — Ce portail existait encore au commencement
de ce siècle, mais il n'en reste plus aucun vestige.
Tel était l'état
topographique de la ville forte vers la fin du XVe siècle, ainsi
qu'il appert des documents ci-dessus et même de l'état actuel des lieux, le
tout corroboré par un arrêt du Parlement de Bordeaux du 7 septembre 1500, rendu
entre le baron de Mareuil, le baron de Nontron et le syndic de cette ville, au
sujet d'un droit de péage réclamé par le premier des marchands de Nontron se
rendant à Mareuil. Le syndic y énumère ainsi qu'il suit la situation de sa
ville :
« Predictus Nontron major et principalis platea
vicecomitatu Lemovicorum et majoris autoritatis et preheminencie quam platea
que sit in dicto vicecomitatu texta et reputata ab omnii anno existerat et
existabat... Verum in predicto Nontronio omnia insigno baronie ut hospitali
magno constructionis pulchri et magni revenuti, plures magne ecclesie,
conventus mandicancium, leprosaria cum sua ecclesia et cimmiterio existebant...
»
Mais, à partir
des dernières années du XVe siècle, jusqu'aux premières du XVIIe,
la ville de Nontron s'étendit au-delà de son enceinte par la création de quatre
faubourgs, dont nous allons parler, par ordre d'ancienneté.
Septième
groupe.
Faubourg Salomon. - Construit au sud-ouest et à la suite
de la rue Basse-du-Rieu, après la porte du Verrier, à l'abri de la forteresse
et au-dessous des ruines du Bragier, d'après l'état actuel des lieux et les
documents suivants :
« Du 2 novembre 1642, reconnaissance par Jean
Sacreste, pelletier, a M. d'Aguesseau, sur une maison et cheneviere au faubourg
Salomon ».
« Du 2 novembre 1642, autre reconnaissance à M. de
Colonges sur une maison et cheneviere au faubourg Salomon. »
« Du 5 décembre 1661, devant François Pastoureau,
notaire, vente par Guilhaume Ribadeau, maistre chirurgien, d'une maison sise et
située dans le faubourg de Sallomon et près le portail du Verrier, avec un
jardrin et un petit loppin de cheneviere par le dernier de la dicte maison...
icelle maison estant sur main gauche, allant de la présent ville au bourg de
Saint-Martial-de-Valette... Le dict jardrin et cheneviere confrontant par le
haut dicelle cheneviere aux anciens murs du chasteau de la présent ville... »
« Du 8 mars 1738, devant de Saunier, notaire,
reconnaissance de douze deniers de rente en faveur de dame Françoise Dubarry,
marquise de Fayolle, sur une maison sise dans la rue Basse-du-Rieu de
Merdanson, du dessoubs le portail du Verrier, confronte a la rue que lon vat du
dit portail a la croix Mercier. »
« Du 1er septembre 1742, reçu Grolhier, notaire, vente
d'une maison au faubourg de chez Salamont, confrontant au portail de la ville.
»
« Du 29 février 1758, devant Boyer, notaire,
reconnaissance en faveur de M. Jean-Charles de Lavie, seigneur baron de Nontron,
sur trois maisons dans la rue Basse, confrontant du couchant a la dite rue par
laquelle lon va de la place du canton au faubourg de Salomon, a raison de six
sous et trois deniers de rente, et de faire faire la garde suivant baillette et
reconnaissance des 10 mai 1583 et 31 janvier 1658. »
2° Faubourg des Oliers, plus tard Rue des
Religieuses. — A la suite de la place de la Cahue, au
nord et au-dessus de la porte Limousine. En 1741 et 1501, ce faubourg n'est
qualifié que de chemin sur lequel s'établirent, à gauche en montant et avant
1528, des fabricants et marchands d'huile, d'où son nom des Oliers, remplacé au
XVIIIe siècle par celui de faubourg des Religieuses, par suite de la
construction, en 1625 et dans les vergers à droite, du couvent et de l'église
des dames religieuses de Sainte-Claire. C'est ce qui ressort des actes suivants
:
« Du 28
novembre 1471, reconnaissance consentie par Pierre Régis à François de La Porte
….. sur un vergier siltue en la paroisse de Nontron, confrontant au chemin
public quon vat de la porte Limousine vers la croix de Lonne et au vergier du
dit Pierre Régis et aux terres des hoirs de feu Janot de Laperonne, sous la
rente de deux deniers. Reçu par Eymeric de Charlanges, notaire ».
Du 7 janvier
1501, vente par Emeri Espor, prêtre, Marguerite et Etienne Escousau, ses
neveux, à Jean Pastoureau, jeune, dans la banlieue de Nontron, hors et près la
porte Limousine, de la tierce partie d'un jardin, confrontant au susdit chemin
:
« Honorabili viro domino Eymerico Esporij,
presbitero, et Margarita et Stephano Escosaultz, fratribus et nepotibus ipsii
domini... Vendiderunt.... prudente viro Johanne Pastourelli juniore, mercatore
de Nontronio.... tertiam partem viridarii siti in suburbis de Nontronio et
extra et prope portam Lemosini, confrontatam cum itinere quo itur de dicta
porta Lemosini versus Auginhaco ex una parte et cum treilha heredibus Theobaldi
et magistri Helio de Podiozillou ex alia. Et cum viridariis domini de Romaing
et quibusdam viridario et prato Johannis Regis ex reliqua.... Signé : P. de
Domailhaco. R. »
Mais, avant
1528, cette localité prend le nom des Oliers; ainsi :
Du 9 décembre
1528, arrentement par noble Jeanne Pastoureau, veuve Poisson, à Jean Arbonneau,
de deux vignes au dit lieu des Oliers :
« Nobili et discreto viro magistro Ludovico de
Puizillou in utroque jure baccaloreo helesimonario religioso helesimonarie de
Nontronio et capellano de Messinhaco ville Nontronij habitatore et procuratore
nobilie Johanne Pastoureau, vidue honorabilis et discreto viri magistri Malhurini
Pissis, cum vivebat advocati in curia presidiale seneschali Petragorensi....
Assensavit perpetuo seu ad assensam et amphiteosim perpetuam tradidit...
Prudente viro Johanne Arbonneau, mercatore de Nontronio... Videlicet duas
playdaras adjunctas et continuas existantes treilhas et vinheas sitas et
situatas supra portam Lemosini, ville Nontronij, et in loco vocato Aux Oliers confrontatas a parte ante cum itinere quo itur de La
Cahua, ville Nontronij, versus Auginhacum a parte fundi cum viridario et treilhas
Gerardi et domini magistri Leonardi Baleston, ab uno latere cum quasdam
treilhas jam dicti et ab alio latere cum quadam playduram in treilhas de Helio
Delabouffeuie, chapellario... sub redditu sexagenta septem solidorum et sex
denarios renduales in quolibet festo domini N. J. Ch.... Signé : P. de
Domailhaco. R. »
C'est sur ces
terrains que fut construit, en 1625, le couvent des religieuses, et, à partir
de cette époque, les deux dénominations furent alternativement employées.
« Du 20
novembre 1657, reconnaissance de rente sur maison, grange, pressoir, jardin et
chenevière au faubourg des Religieuses de la ville de Nontron. »
« Du 20
février 1658, reconnaissance de rente sur maison et jardin au faubourg des
Oliers, par Louis Rousseau, bourgeois, à
M. de Porapadour. Signé Vieillemard, not. »
« Du 11
novembre 1698, saisie féodale au requis de messire Léonard-Hélie de Pompadour,
marquis de Laurière, de maison, jardin et pré au faubourg des Oliers, acquis
par Pierre Giroux d'Annet Félix, sieur des Oliers, faute de paiement des lods
et ventes. »
« Du 7
août 1736, devant Grolhier, notaire, testament de Léonard Roy, Bieur du Bois de Gaumondière, habitant
en sa maison noble du Peyrat, près de la ville de Nontron, et vente du 20 octobre 1742, par le même
habitant au faubourg des Oliers, en sa maison noble du Peyrat, à Jean de Labrousse, de six livres
de rente sur des
maisons du dit faubourg.
»
Cette maison
noble du Peyrat était la première du faubourg, à droite, en montant vers le nord,
entre la porte Limousine et les bâtiments du couvent. Elle existait encore en
1825, et se composait d'un rez-de-chaussée, d'un premier étage et d'un grenier
surmonté d'une toiture à pignon élevé, couverte en tuiles plates et surmontée
par deux grandes girouettes, placées plus tard sur le faîte de la maison,
construite, vers cette époque , sur l'emplacement de la première.
« Du 10
août 1746, devant le même notaire, vente par Bonnamour à M.
Labrousse du Bosfrand, d'immeubles dans le faubourg des Religieuses. »
« Du 30
avril 1746, même notaire , reconnaissance de trente sols de rente en faveur de
M. Jean de Labrousse, sieur du Bosfrand, par Mathieu Gros, cordier, sur une
maison et jardin au faubourg des Religieuses, autrement des Oliers, confrontant
par le devant à la rue
publique par laquelle lon va de la place de la Cahue à la croix de l'Homme et à Augignac,
et d'un côté à l'église
des dames religieuses de Sainte-Claire, sur l'emplacement de laquelle était
autrefois la maison des héritiers Dézeimeris, une endronne entre deux, et avec
l'enclos des dites dames, suivant autre reconnaissance du 25 janvier 1621.»
Cette maison
Gros est la dernière, à droite, en montant vers le nord.
Quant à la porte
Limousine, il en restait encore des vestiges en 1823, mais, par délibération du
8 septembre de cette année, le conseil municipal de Nontron ordonna la
démolition de l'ancienne pile du portail de ville, rue du Nord, nom
substitué au premier depuis la Révolution.
3° Faubourg
des Etanches. -
Au nord de la basse-ville, et faisant suite à la rue des Etanches ou des
Arceaux, ce faubourg renfermait diverses tanneries avec barrages sur le
ruisseau, d'où son nom des Etanches :
«Du 22 février 1671, devant Mazière, notaire, vente
d'une maison dans la rue du Rieu, allant du faubourg des Etanches au Canton sur
main droite. »
« Du 6 août 1725, devant Danède, notaire,
reconnaissance de rente en faveur de M. Gabriel-Maurice de Lavie, sur une
maison et jardin au faubourg des Etanches. »
« Du 18 mai 1750, reçu Boyer, notaire, autre
reconnaissance en faveur de M. Faurien, sieur deMautrot, sur une maison et
jardin au faubourg des Etanches. »
Ce faubourg,
construit au-dessous et à l'abri du fossé et du mur d'enceinte de la place de
la Cahue, à l'ouest, communiquait avec la ville-haute par le petit
Puy-de-Bayet, coupé, vers le milieu, par une porte de ville, dont on voit
encore quelques vestiges aux coins de deux maisons bordant la rue des Fossés,
qui se prolonge parallèlement avec la Grand'Rue, à l'ouest, et relie les deux
Puy-de-Bayet.
4° Faubourg
de la Croizette. - A la suite de la rue du Cimetière ou de
Notre-Dame, sur l'ancien chemin de Nontron à Limoges, ce faubourg a dû être
construit, en majeure partie, du XVIe au XVIIe siècle,
l'avant-dernière maison à droite, en descendant, portant, gravée au sommet de
sa porte à plein cintre, la date de 1638. Voici, d'autre part, extraits de
quelques actes antérieurs et postérieurs, où il en est fait mention :
« En 1613, devant Fonreau, notaire, vente
consentie par Thibeau de Labrousse et Blanche Phélip, sa femme, habitant au
faubourg de La Croizette. »
« En 1637, devant de Basset, notaire, vente de
maison et jardin, au faubourg de La Croizette, et d'une terre joignant la terre
de Estienne Pecon, sieur de Balaran. »
«Du 12 décembre 1649, reçu Peyrot, notaire, vente à
Mathurin Monmège, marchand, habitant au faubourg de la Croyzelte. »
« Du 22 février
1693, devant Quillac, notaire, reconnaissance de rente par Lazare Feuillade, en
faveur de messire Georges de Beynat, seigneur baron de Lavallade, sur une
vigne, au Mas de La Tarrière, près la ville, confrontant par le bas au grand
chemin allant du faubourg de La Croizette au ruisseau de l'étang. »
Le nom de cette
rue provient de l'existence d'une croix plantée à son extrémité, vers l'est, et
devant laquelle on déposait les cercueils, en attendant la venue du clergé pour
la levée du corps et son transfert à l'église et au cimetière.
Tels furent
l'origine et les développements successifs de la ville de Nontron jusqu'à la
fin du XVIIIe siècle, sauf à les compléter, à la fin de cette étude,
par l'indication des améliorations et agrandissements survenus depuis. Mais, en
attendant et pour rester dans le passé, nous allons rechercher les divers
événements et faits militaires dont cette ville fut le théâtre à cette époque
et jeter ensuite un coup-d'œil sur ses anciennes institutions.
R. de Laugardière.
(A suivre.)
Source: Bulletin SHAP, tome XII (1885), pp. 412-447.
ESSAIS TOPOGRAPHIQUES,
historiques et
biographiques sur l'arrondissement
de nontron (Suite).
commune de
nontron (Suite).
§
II. — Faits
de guerre.
Nous avons déjà
dit, dans le chapitre relatif à la fondation et à la construction de Nontron, que
cette ville fut, autrefois, murée, entourée de fossés et close par des portes ;
ce qui, pour la partie haute, dut en rendre la prise difficile avant
l'invention du canon et son emploi dans les sièges, c'est-à-dire jusques vers
le milieu du XIVe siècle.
Le système de
défense de Nontron était, d'ailleurs, complété, à l'intérieur, par des
endronnes ou ruelles étroites, donnant accès d'un quartier dans un autre, et
aussi de l'enceinte à l'extérieur. C'est ainsi que, d'après les titres déjà
cités, et même d'après l'état actuel des lieux, il en existait deux dans le
quartier du Fort, trois sur la place de la Cahue, quatre dans la rue
Chantemiolo, trois dans la rue du Cimetière ou de Notre-Dame, et, enfin, une
autre dans la Grand'Rue avec bifurcation dans celle de Chantemiolo. Cette
dernière ruelle partait de la cinquième maison, à gauche en descendant la
grande rue et aboutissait à une poterne, dont la voûte en pierre existe encore
et sert de passage à cette maison pour aboutir, au sud-est, dans le vallon du Bandiat,
au-dessous des anciennes terrasses clôturant la ville sur ce point.
Il y avait enfin
des passages souterrains pour mettre la ville haute en communication avec le
dehors et, notamment, avec le quartier du Bragier et celui du Bandiat, où
l'ouverture de l'un de ces souterrains existe encore dans le dernier jardin ou
emplacement de maison, bordant à droite, en descendant, le sentier qui conduit
du quartier du Fort au dit vallon. Ce souterrain, comblé par des éboulements à
quinze mètres de son ouverture et taillé dans le roc, se dirige vers le château
de Peytavis pour aller déboucher dans la Grand'-Rue et dans les caves d'une
ancienne maison noble, la cinquième, du côté gauche, en montant vers la Cahue,
et reconstruite il y a une quinzaine d'années. Cette maison, avec sa tour
d'escalier en pierre et son rempart sur le fossé de la ville, serait-elle celle
arrentée en 1388 à Pierre de Lestrade ? C'est probable. Quoi qu'il en soit,
elle a dù assurément appartenir à un homme d'armes, à en juger par un casque de
chevalier du moyen âge que, lors de notre jeunesse, nous y découvrîmes dans un
coin de grenier. Ce casque, en fer forgé, à collerette et à deux visières
mobiles, damasquiné, fort pesant et bien conservé, malgré la rouille qui
l'avait envahi, fut porté plus tard à la campagne et placé sur la tête d'un
homme de paille, où il servit ainsi d'épouvantail aux oiseaux, après avoir, à
d'autres époques, mis plus d'une fois en fuite les envahisseurs de Nontron... Sic transit
gloria mundi !
Tel était, au
point de vue stratégique, la situation intérieure de Nontron, auquel on ne
pouvait d'ailleurs aboutir que difficilement et par diverses voies, étroites et
à pentes plus ou moins rapides sur un sol des plus accidentés.
La plus ancienne
de ces voies et la seule qui, passant à travers les landes et les
châtaigneraies, offrit une largeur indéterminée, était la Grande-Pouge, ou grand chemin
(ancienne route gauloise, d'après M. de Taillefer), qui conduisait du midi au
centre de la France, sur le faite des collines, au sud-est et à moins de deux
kilomètres de Nontron. C'est ce qui résulte des traces encore visibles de cette
voie, ainsi que de divers actes et, spécialement, d'un bail à rente du 14
novembre 1523, reçu Mercier, notaire, et consenti par :
« Noble Simon Conan, escuyer, seigneur, de Connezac,
comme mari et conjoincte personne de noble Marie de La Porte, dame des maisons
nobles de La Beytour et de Valette, a Geraurt Graullier... Scavoir est ung
village appelé de Vicl-Mafray, en la paroisse de Saint-Angel, confrontant avec
la Grande-Pouge-Feytan... par laquelle on vat de Chalus-Chabrol vers Pontarnal... tirant au long de la dicte Pouge jusques au chemin par lequel lon vat et descent de
la dicte route vers Quinsac et avec les bois appelés le Mas-de-Laige... »
Il s'agit ici
d'une partie de la route postale, indiquée sur la carte de 1693, conduisant de
Bayonne et Bordeaux à Limoges, et passant par Pontarneau et par
Saint-Front-de-Champniers, au-delà duquel elle se bifurquait pour se diriger,
d'un côté sur Saint-Pardoux-la-Riviere, et, de l'autre, sur le sommet des
collines, à l'est de Nontron, où elle passait près du village de Goulat et se
dirigeait sur Chalus. C'est ce qui ressort encore de l'état des lieux et de
divers actes dont nous parlerons, et, notamment, d'une reconnaissance de rente
de 1655 sur « le bois de Beaulieu, près Goulat, joignant... au grand chemin que
lon val de Pontarnaud à Chaslut... »
C'est par là que
les troupes anglaises partant de Bordeaux ou de Limoges pour assiéger Nontron,
devaient aborder et camper sur les trois collines en face de la ville, au sud,
et de l'autre côté du Bandiat, notamment sur celle de La Doissière et son plateau
de Las-Hautas-Jaurias,
formant
encore un carré long, inaccessible de trois côtés et auquel on ne peut parvenir
de plein pied que par la Grande-Pouge.
Pour aboutir
ensuite de cette Grande-Pouge à Nontron, il fallait, après être descendu des
collines, traverser le Bandiat sur le pont d'Ambrie, disparu du XVIIe au XVIIIe siècle, et qui avait
été établi à la pointe de l'ile du moulin de La Nauve, puis monter à pic les
sentiers conduisant à la forteresse et au castrum. Il est question de ce pont
dans les actes suivants :
Du 16 novembre
1503, reconnaissance de rente consentie en faveur de Pierre Boschaud, au nom de
Jean et Marie de La Porte, fils et fille de Tristan de La Porte, par Jean
Marquent, du lieu et mainement de Born, de Bornio, parochie
de Nontronio., sur
:
« Quadam vineam sitam in manso de Lasgrafeuil...
confrontatam cum itinere quo itur de ponte Dambrie versus meynamentum de Azaco ex una parte et cum
vineam vocatam de La Colarie ex alia et in lundi cum vinea Geraldi de
Mazerac... Signé : G. Fantif, R. »
Du 19 juillet
l520, échange entre noble Jehan de La Porte, et noble Jehan de Puychillou, par
lequel celui-ci céda au premier : « Cinq sols de
rente sur une cheneviere et treillas sittuées dans la paroisse de Nontron,
confrontant à un chemin qui va du pont Dambrie vers le mas de
Limassieras d'une part et avec le fleuve du Bandiat... Mongermont, R. »
Une
autre voie, au sud-ouest, partait de Nontron eu traversant le faubourg Salomon,
passait devant la Croix-Mercier et, longeant le Bandiat, allait aboutir au-delà
de La Boissière à un autre pont, également disparu, dit pont de Valette. De là
cette voie montait dans la gorge située entre le village de Chez-Pouge et le
repaire de Naudonnet, traversait la Grande-Pouge sur le plateau et descendait
vers Brantôme pour aboutir à Périgueux. Un embranchement partant du pont de
Valette faisait aussi communiquer Nontron avec le bourg de
Saint-Martial-de-Valette par un étroit chemin qui existe encore. Voici,
d'ailleurs, quelques extraits de rentes à ce sujet :
Du 15 janvier
1470, bail à cens par noble François de La Porte, seigneur de Champniers, La
Beytour, de Valette, etc., pour lui et pour Jean et Tristan de La Porte, ses
frères, du moulin de Valette, terres, prés et chenevières, confrontant :
« Cum itinere quo itur de Nontronio versus pontem de
Valeta... Et quadam terram in dicto manso de Valeta sitam et confrontatam... cum itinere
per quo itur de terra vocata la Cruci-Mercier versus dictum pontem de Valeta...
J.
Robini, R... »
Du 20 janvier
1577, reconnaissance de rente en faveur de Thibaud Pastoureau, sieur de La
Grange, par Pierre de La Roussarie, juge de Montcheuil, sur « une tenance au
mas de Las Seyteradas, près Nontron, confrontant par un bout le grand chemin
que lon va de la ville a la Croix-Mercier et d'illec au bourg de Saint-Martial-de-Valette...
Le Noble, n. r.... »
Nous
trouvons enfin dans un dénombrement fourni le 17 mai 1624, par noble Jacques de
Conan, l'indication du susdit moulin de Valette, confrontant, y est-il dit : «
Avec le chemin que lon vat de Nontron a Brantosme... plus une terre aux dites
appartenances qui se confronte au susdit chemin, et avecq le terrier appelé de
Naudonnet, et au chemin quon vat du pont de Valette au bourg de Sainct-Martial.
»
Il existait, au
surplus, et il existe encore à l'ouest de Nontron un autre chemin partant de la
rue Aux-Peyras et du portail des Cordeliers jusqu'au dit bourg de
St-Martial-de-Valette, avec embranchement conduisant au moulin des Isles, et de
là, en longeant le Bandiat, à Javerlhae et à Angoulême. C'est ce qui résulte
des extraits suivants :
« Du 27 janvier 1482, devant Fourien, notaire,
reconnaissance de rente en faveur de Thibaud Pastoureau, sur une pièce de vigne
de huit journaux d'homme à labourer au mas de Lobespi... joignant le chemin qu'on
va de la ville de Nontron au moulin des Isles. »
« Du 12 novembre 1490, reconnaissance en faveur de
Jean Pastoureau d'une rase de vigne au maynement de Laubespie... joignant le
chemin quon va de Nontron vers les Isles. Signé Freteli. »
Si, maintenant,
nous remontons de là vers le nord de Nontron, nous y trouvons les traces d'un
ancien chemin partant de la croix du Peyrat, au-dessus des étanches, près de la
fontaine St-Pierre, et se dirigeant vers Javerlhae, d'après un bail en faveur
de Jean Pastoureau du 20 janvier 1489, sur :
« Petiam terre inculte sive chamfreys sitam in
parochia de Nontronio et in manso de La Mota confrontatam... a parte capitis
cum itinere quo itur de Cruce du Peyrat versus Javerlhacum. »
Plus au nord et
à la suite du faubourg des Oliers, existait le grand chemin allant au portail
Vieillemard, servant, à un kilomètre de la ville, de limite aux lépreux, et qui
doit son nom au dignitaire de Nontron qui l'y fit construire. De ce point il se
dirigeait, en se bifurquant : 1° Sur Augignac et
de là sur Piégut, Pluviers et Champniers, jusqu'à Saint-Mathieu en Poitou ; 2°
et sur la Maladrerie, le Bourdeix, Étouars et Soudât, pour aboutir à Montbron
en Angoumois, d'après les cartes du XVIIe siècle et les traces
encore visibles. Il en est aussi question dans les titres suivants :
Du 20 janvier
1489, bail à cens par Jean Pastoureau jeune, sur la moitié d'un bois
châtaignier confrontant : « Cum itinere quo itur de Nontronio versus
Le Bourdeys et cum nemore Leprositi de Nontronio... »
Du 14 février
1496, reconnaissance de rente au même sur une pièce de terre au village du
Chatenet, confrontant : « Cum itinere per quandum itur de
Nontronio versus Podium aculum... »
Du 9 décembre
1528, bail à cens par Jeanne Pastoureau sur :
« Duas pleyduras
situatas super porlam Lemosinam ville Nontronii et in loco vocato aux Oliers
coufrontatas ex ante cum itinere quo itur de la Cahue ville Nontronii versus
Auginihacum... »
Arrivé
près de la Maladrerie, le chemin de Nontron au Bourdeix recevait un
embranchement se dirigeant à gauche vers le chemin de Nontron à Javerlhac et
Angoulême, avec lequel il se soudait près du ruisseau de La Ganne ; puis, à
droite et en sortant du village de la Maladrerie, un autre embranchement
aboutissant, non loin de là, au chemin de Nontron à Augignac et à Piégut. C'est
ce qui résulte de l'état des lieux et d'une reconnaissance de rente du 1er
janvier 1471, en faveur de Jean, François et Tristan de La Porte, sur un bois
confrontant : « Cum
itinere quo itur de Nontronio versus Javerlhacum et cum itinere quo itur de
Nontronio versus Podium acutum... »
Enfin, une autre
voie principale, encore existante, partait de Nontron, à l'est, se dirigeant
sur Savignac, où elle se bifurquait en deux embranchements, celui de droite traversant
le bourg et allant rejoindre la Grande-Pouge de Nontron à Chalus, et celui de
gauche se dirigeant, avant le bourg, vers celui d'Abjat, et de là sur Marval,
en Poitou ; ainsi, d'ailleurs, qu'il appert de l'état des lieux et de la carte
de Belleyme. Cette voie, partant du faubourg de La Croizette, était autrefois
généralement suivie pour aller de Nontron à Chalus et à Limoges.
Mais, ainsi que
nous l'avons déjà dit, toutes ces voies, tracées à vol d'oiseau à travers
collines et ravins, étaient, à part la Grande-Pouge, si étroites que les
charrettes des paysans y passaient à peine, et que jusques vers 1830 on n'y
voyageait qu'à pied ou à cheval. Qu'on juge par là ce que devait être, du VIIe
au XVIe siècle, cet état de viabilité.
Et cependant, au
point de vue stratégique, toutes ces difficultés accumulées sur le parcours des
voies de communication étaient d'un très grand avantage pour la défense de la
ville de Nontron, ainsi que le constate Alain d'Albret, en 1502, dans le procès
de Jeanne de Bretagne, sa femme, contre la dame de Montrésor, sœur de celle-ci,
à l'occasion de la succession de Guillaume de Bretagne, vicomte de Limoges,
leur père. La dame de Montrésor affirmait dans son mémoire judiciaire, conservé
aux archives de Pau, que : «Le chasteau de Nontron estoit des plus forts du
pays lymosin, et quon nen pourroit pas construire un pareil pour quarante a
cinquante mille livres. »
A quoi Alain
d'Albret répondait que : « Ce chasteau netoit fort que parce que lavenue en
estoit mauvaise, que ledifice estoit pauvre et ruiné, et que luy et sa femme y
avoient fait faire un bastiment qui avoit cousté trois cens livres. »,
Il ajoutait enfin :
« Pendant les grandes guerres et hostilités qui
parcydevant ont eust cours en ce royaume et mesmement au pays de Guyenne, le
Lymosin et Perrigort ont este destruits et faicts quasi inhabitables... Les
places des seigneuries et bastiments furent desmolis et abattus, et ny avoit de
bastiment qui ne fust si vieux et ancien que de soi mesme ne soit venu a
décadence... »
Quelles furent
donc les grandes guerres et hostilités dont la ville de Nontron eut
particulièrement à souffrir, avant et depuis cette époque ?
Pour répondre à
cette question et sans remonter à l'invasion des Kimris, venus d'Asie en Gaule;
ni à l'occupation romaine de l'an 59 avant Jésus-Christ ; ni à l'invasion des
Visigoths qui débordèrent sur le Limousin en 412 ; ni à la conquête des Francs
qui, en 507, passèrent par la même contrée pour aller chasser les Goths des
bords de la Garonne ; ni au passage des Sarrasins qui vinrent, en 732, se faire
battre par Charles Martel entre Tours et Poitiers, d'où ils rétrogradèrent en
traversant le Limousin, où quelques-unes de leurs bandes restèrent assez
longtemps, disent les historiens ; sans remonter aussi loin, disons-nous, et
pour ne pas déroger à notre méthode de ne rien avancer sans preuves écrites,
nous allons nous borner à relever les faits principaux, conservés par
l'histoire à partir du IXe siècle.
1° Invasion des
Normands. — La
ville de Nontron, lisons-nous dans la Guienne historique « fut
impitoyablement ravagée par les Normands ; après un long combat, les barbares
s'étant emparés de la forteresse, mirent tout à feu et à sang. Au Xe
siècle, la flamme avait encore laissé des traces sur les murs noircis et à demi-écroulés
du donjon. »
L'auteur
n'indique point de date, mais le Périgord illustré nous apprend que
c'est au IXe siècle que « Nontron fut saccagé par les Normands, »
et, parlant de l'invasion, M. l'abbé Audierne ajoute : « Les Normands, suivant
Adémar, Mabillon et la chronique de St-Vandrille, avaient commencé leurs
invasions dans l'Aquitaine vers l'an 847. Les chroniques ne sont pas d'accord
sur l'année de la prise de Périgueux par ces barbares : les unes la mettent en
848 et d'autres en 849. Nous nous attachons à cette dernière opinion qui est
celle de l'auteur des annales de Saint-Bertin. Ce peuple vagabond se répandit
dans toute la province, qu'il ravagea.
En 845, dit M.
Marvaud dans son Histoire
de la vicomté de Limoges, l'Aquitaine fut envahie par les Normands,
qui entrèrent à Limoges comme alliés de Pépin II. Deux ans après, nouvelle
invasion et pillage de cette ville, ainsi que de tout le Limousin, que leurs
dernières bandes continuèrent à parcourir jusques vers 860.
Il résulte donc
de ce qui précède que le siège de Nontron par les Normands dut avoir lieu de
818 à 819, avant ou après la prise de Limoges et de Périgueux.
2° Guerres contre
les Anglais. - Mais
la ville de Nontron eut particulièrement à souffrir des guerres anglaises qui
sévirent en Limousin et en Périgord, du XIIe siècle à 1453, époque à
laquelle Charles VII, roi de France, réunit définitivement l'Aquitaine et la
Guienne à sa couronne, et ce dans les circonstances suivantes :
Le ler août
1137, le mariage d'Eléonore de Guienne avec Louis VII réunit pour quelque temps
toute l'Aquitaine à la couronne de France. Mais, après le divorce de ce prince,
Eléonore se remaria, le 18 mai 1152, avec Henri Plantagenet, qui devint roi
d'Angleterre et lui soumit cette province.
En 1168, révolte
des grands vassaux d'Aquitaine contre Henri II, roi d'Angleterre, qui, en 1170,
céda ce duché à Richard, l'un de ses fils.
En 1176, reprise
des hostilités par le vicomte de Limoges et par les comtes de Périgord et
d'Angoulême contre Henri II et Richard, ces derniers ayant à leur solde, dit
Marvaud, « de nombreux aventuriers appelés Routiers, Brabançons ou Cotereaux,
bandits en temps de paix, soldats en temps de guerre, pillant les églises, les
châteaux et les cabanes »...
En 1186, dit M.
de Verneilh-Puyrazeau dans son Histoire d'Aquitaine : « Une bande,
conduite par Mercader, qui s'autorisait du nom de Richard, ne tarda point à se
montrer, parcourant les campagnes et les mettant à contribution. Déjà il avait
pillé les bourgs et petites villes d'Hautefort, de Nontron, de Chalus, de
Saint-Junien, de St-Léonard... Les chevaliers de la paix se mirent à sa
poursuite et réussirent enfin à en délivrer le pays. »
Le même fait est
rapporté par M. Duroux dans son Historique de la Sénatorerie de Limoges en ces termes :
« L'évêque Sébrand-Chabot réunit à Limoges, en 1186,
le plus de troupes qu'il put. Elles se mirent de suite en marche et
rencontrèrent les pillards réunis à peu de distance de Limoges, les attaquèrent
et en laissèrent plus de six mille sur la place... Cela n'arrêta pas cependant
les ravages de Mercader, chef d'une troupe de vagabonds qui désolaient ce pays
sous le faux prétexte de servir les intérêts de Richard Cœur-de-Lion. Ces
barbares avaient pris et pillé Autefort, Nontron, Chalus, St-Junien, le Pont de
Noblac, Aubusson, Felletin, Cluis et autres places ; en un mot, ils s'étaient
attachés surtout à détruire les possessions du vicomte de Limoges. Mais les
Pacifères en firent justice, ce qui fit que de quelque temps on n'entendit plus
parler d'eux dans le Limousin. »
En 1190,
Philippe-Auguste et Richard, oubliant leurs querelles, firent la paix et
partirent pour la Palestine, d'où ce dernier ne revint en Limousin qu'en 1193.
Mais, dans cet intervalle,
et en attendant le retour du « Diable déchaîné », dit M. Marvaud dans son Histoire de la
vicomté de Limoges : « Les barons du Périgord, de l'Angoumois
et du Limousin, dociles encore aux conseils de Bertrand de Born, avaient relevé
leurs bannières ; leurs forteresses et leurs châteaux, pris par leur ennemi
dans la dernière guerre, s'étaient encore ouverts à leurs hommes d'armes. La
garnison de celui d'Ayen, par l'ordre du vicomte de Limoges, ravageait les
terres du prince anglais. Adhémar V et le comte d'Angoulême avaient été les
premiers à l'attaque. »
De 1194 à 1195,
reprises des hostilités entre Philippe-Auguste et Richard, et le 15 janvier de
cette dernière année, traité de paix qui ne dura que six mois et fut suivi
d'une nouvelle guerre, prolongée pendant trois ans et suspendue par une trêve
de cinq ans conclue entre les deux rois, le 14 janvier 1199.
Dans cet
intervalle, dit M. Marvaud : «Presque sur tous les points, la France du Midi
protestait contre une suzeraineté étrangère. Les grands vassaux bravaient si
ouvertement la puissance des Plantagenets qu'avant la paix de Gisors, le comte
d'Angoulême et le vicomte de Limoges, renonçant à tout hommage envers Richard,
s'étaient donnés au roi de France. »
D'après le Père
Bonaventure de St-Amable, le traité intervenu à ce sujet est conçu en ces
termes :
« Moi, Aymard,
vicomte de Limoges, fais connoitre a tous qui verront cet écrit que j'ai fait
les accords et conventions suivantes avec monseigneur Philippe, illustre roi
des François, parce que à cause des injures que Richard, roi d'Angleterre, m'a
fait et à mon frère Aymard, comte d'Angoulême, il alla de ma part vers le roy,
et je fis confédération avec luv de cette façon : que je l'aideray toujours
selon mon pouvoir comme mon seigneur, et ne me retireray jamais de luy que par
ses ordres, et que, s'il me joignoit jamais à quelque autre, il me donnera ses
lettres patentes qu'on me laissera en paix ; et si on y manquait, il m'aidera
contre celui-là. Que si ce nouveau seigneur vouloit agir contre mon roy
Philippe, je m'y opposeray, rendant de bonne foy secours et aide au susdit roy
Philippe.
Fait
à Aréde, l'an 1199, au mois d'avril. »
M. Marvaud, qui
a reproduit ce traité, est d'avis qu'il est de l'année 1198, et M.
Grellet-Dumazeau partage entièrement cet avis dans un savant article sur Chalus
et la mort de Richard, inséré en 1854 dans le Bulletin de la Société
archéologique et historique du Limousin ; le dit traité étant antérieur à cette
mort, survenue le 6 avril 1199.
Le roi
d'Angleterre eut-il connaissance de ce traité, et est-ce pour en punir le
vicomte de Limoges qu'il entreprit le siège de Chalus ? M. Dumazeau est pour
l'affirmative et constate que ce fut pour s'approprier un trésor imaginaire.
M. l'abbé
Arbellot. l'érudit président de la Société historique du Limousin, dans un
travail remarquable publié en 1878 dans le Bulletin de cette
Société, a émis le même avis et traité de légende fabuleuse le récit de Roger
de Hoveden sur la prétendue découverte de ce trésor donnant lieu au siège de
Chalus.
Mais M. Marvaud
a pensé le contraire et admis la fable du trésor comme ayant été la cause
unique de ce siège. Il constate, d'ailleurs, que si Richard a dû ignorer le
traité de 1198, il n'en saisissait pas moins toutes les occasions de nuire au
vicomte de Limoges, et il en relate, pour preuve, certains faits antérieurs,
ainsi qu'il suit :
« Il (Richard) parcourut le Limousin, visitant les
petites garnisons qu'il avait installées dans quelques places fortes, caressant
les petits feudataires qu'il savait être les ennemis du vicomte de Limoges...
Mais le vicomte, qui venait de faire prisonnier Audier, sénéchal de la Marche,
et de lui faire payer sa rançon vingt mille sous, se montrant trop fier de ses
avantages, il tourna contre lui toute sa colère, l'appelant par dérision : Le
vicomte de Ségur qui se fait vicomte de Limoges. Alors, il menaça avec ses
routiers les places de Nontron, d'Authefort, de Salaignac, de Ste-Livrade et de
Puy-Aigu. Après avoir pris ce dernier château-fort, dont il fit démolir une
partie du haut donjon et en avoir ruiné d'autres dans le Périgord et dans le
Limousin, il parut vouloir pour quelque temps vivre en paix... Peut-être aussi
était-il effrayé des dispositions des barons qui, secrètement autorisés par
Philippe-Auguste, menaçaient de le rendre courtois s'il venait les attaquer...
Un nouveau prétexte de satisfaire son ambition et sa haine s'offrit bientôt à
Richard. On vint lui dire que le vicomte de Limoges avait trouvé dans les
souterrains de son château de Chalus un immense trésor... etc.. »
Suivent la
légende du trésor et le récit de la blessure et de la mort de Richard, d'après
Roger de Hoveden.
Mais ici doit
trouver place la chronique du moine anglais Gervais de Cantorbéry, d'après
laquelle Richard aurait été blessé au siège de Nontron. Ce chroniqueur,
contemporain de ce roi, s'exprime ainsi :
« Anno gratia mcxcix. — Rex castrum comitis Engolismi quod Nuntrun erat
appellatum obsedit et tandem compulit ad deditionem : nam expensis in ipso Castro cibariis,
missis numiis obsessi misericordiam ab ipso rege pedebant et vilam. Qui cum
petitam respueret pietatem et sola violentia vellet obtinere quod obsessorum
benigna licet coacta voluntate fuerat. Eidem oblatum oblitus forsitam quod in
talibus periculosa esset desperatio, juvenis quidam Johannes Sabras cognomine
stans castelli in muro quadratum telum mediante balista direxit in incertum,
orans Deum et potens ut ipsius dirigeret ictum, et obsessorum innocentiam ab
ipsa liberaret oppressione, jecitque sagittam verum, cum rex tenloriam egressus
baliste sonum audisset infestum, et ut ictum evitaret, caput regium inclinaret
et corpus, in humero sinistro lethaliter percussus est. Desperatus autem rex,
undecimo die pectus tundens et penitens verbo regio protestatus est... Obiit
itaque rex Richardus anno gratia mcxcix,
cycli decennovalis anno tertio, regni vero sui anno decimo, feria tertia post
primam dominicam passionis Domini, VIII scilicet idus aprilis (6 avril)... » (Histoire de France, t. XVII, p. 678.)
Le moine de
Cantorbéry, qui écrivait au moment même où se produisit cet événement par
lequel il voulut clore sa chronique, donne à l'arbalétrier le nom de Jean
Sabras, à la ville assiégée celui de Nontron, et il entre dans des détails tels
qu'il ne parait possible d'en suspecter la source ni la véracité.
Si, d'autre
part, nous consultons les auteurs modernes, nous y trouvons ceci :
« Richard Cœur-de-Lion assiégea Nontron sur la fin
du XIIe siècle contre Guy ou Aymar, vicomte de Limoges. » (Histoire d'Aquitaine.)
« La ville de Nontron,
dans le XIIe siècle, appartenait aux vicomtes de Limoges et
souffrit beaucoup de ses querelles avec le roi d'Angleterre Henri II et les
princes ses enfants. Nontron fut assiégé et pris plusieurs fois, de 1191 à
1199. » (Histoire
des villes de France.)
« Richard, débarrassé de la guerre avec ses frères,
s'occupa de tirer vengeance des seigneurs qui avaient osé lever l'étendard de
la révolte; il assiégea Périgueux, marcha sur Excideuil et livra la petite
ville de Nontron à la dévastation et au pillage. » {Guienne historique.)
« Nontron fut pris et pillé, dans le XIIe siècle, par Richard Cœur-de-Lion. » (Le Périgord illustré.)
De ce qui
précède, il résulte donc jusqu'à présent que sur la fin du XIIe siècle, Nontron
a été assiégé et pris par Richard, qui y fut atteint de la blessure dont il
mourut quelquesjours après.
Mais ici nous
devons reproduire les variantes admises par les chroniques postérieures à celle
du moine de Cantorbéry.
La première est
celle de Roger de Hoveden, autre chroniqueur anglais, qui, écrivant quelques
années après Gervais, place la scène de la blessure et de la mort de Richard à
Chalus, que ce dernier était venu assiéger pour s'emparer d'un grand trésor
d'or et d'argent trouvé par Aymard, vicomte de Limoges, qui en envoya une forte
partie au roi d'Angleterre, son seigneur, lequel refusa cette part, prétendant
avoir droit au trésor entier, en vertu de sa souveraineté. Suit le récit du
siège et de la blessure occasionnée par une flèche, lancée du haut du château
par un archerbaliste nommé Bertrand de Gourdon.
Après Roger de
Hoveden, Rigord, chroniqueur français, mort en 1207, s'empara, dans son Histoire de
Philippe-Auguste, des détails de son prédécesseur, tout en
les amplifiant, et il fit blesser et mourir Richard au siège de Chalus, qu'il
était venu assiéger pour s'emparer d’un trésor découvert, non par le vicomte de
Limoges, mais par un certain chevalier qui s'était mis sous la protection de ce
dernier. Puis, l'imagination populaire aidant, Rigord ajoutait que ce trésor se
composait, d'après ce qu'on rapportait, de statues d'or très pur, représentant
un empereur, sa femme, ses fils et ses filles, tous assis à une table également
d'or :
« Thésaurus autem praedictus, ut ferebatur,
fuerat imperatum quidam de auro purissimo, cum uxore et filiis et filiabus, ad
mensam auream residentibus... »
Après ces
premières citations, il reste à résoudre la question de savoir si Richard
Cœur-de-Lion a été blessé au siège de Nontron ou à celui de Chalus. M. Arbellot
et, après lui, notre savant confrère M. Dujarric-Descombes, sont pour le siège
de Chalus, et ils s'appuient sur la chronique limousine de Bernard Itier, mort
en 1223, d'après laquelle Richard, malade devant Chalus, aurait donné l'ordre
d'aller assiéger Nontron et Piégut, dont ses troupes abandonnèrent le siège à
la nouvelle de sa mort. D'où la conséquence, dit M. Dujarric dans le Bulletin de
la Société historique du Périgord de 1880, que : « Il parait aujourd'hui
suffisamment prouvé que ce roi anglais ne fut point blessé devant Nontron, par
la raison qu'il n'en fit point le siège, et qu'il faut reconnaître
l'authenticité de cette note attribuée à Bernard Itier, qui a donné les détails
les plus précis sur les cire estâmes qui ont précédé et suivi la mort de
Richard. »
Voyons donc
comment Itier s'exprime dans sa chronique, d'après Etiennot :
« Ricardus, rex Anglorum fortissimus, ictu sagitte
in numero percussus est, quam obsedisset turrim quamdam
in quodam Castro pagi Lemovicensis, quod appellatur Chalus Chabrol, ob statuas
aureas Lucii Capreoli, quae ibi repertae sunt. In ipsa turri erant duos milites
cum aliis 38 viris
et mulieribus, unus ex militibus Petrus Bru, aller Petrus
Basilii, de quo dicitur quod sagittam cum balista tractam emiserit, qua
percussus rex infra duodecimum
diem vitam finivit, videlicet feria tertia, ante diem dominicam Palmarum, 8 idus aprilis prima hora noctis. Ipse enim dum
exploraret, praeceperat suis ut obsiderent castellum vicecomitis quod
appellatur Nontron, et quoddam aliud mancipium quod vocatur Montagut, quod et
fecerant. Sed morte regis audita confusi recesserunt. Proposuerat autem ipse
rex in corde suo omnia castella et mancipia dicti vicecomitis
destruere ... »
Mais ce récit
n'est qu'une répétition de ceux de Hoveden et de Rigord, avec la trouvaille
d'un trésor, non plus d'or et d'argent d'après le premier de ces chroniqueurs,
mais composé des statues d'or du second , avec l'addition du nom de Lucius Capreolus
et
le changement de nom de l'archerbaliste[3] qui, de Bertrand
de Gourdon, est devenu Pierre Basile.
Or, s'il est
vrai, comme le disent MM. Dumazeau et Arbellot, que la prétendue existence de
ce trésor ne constitue qu'une légende fabuleuse; si, selon M. Dumazeau, il en
est de même du proconsul romain Lucius Capreolus, inventé par les
chroniqueurs limousins pour expliquer le nom de Chalus-Chabrol[4] ; s'il est vrai
que tous ceux qui ont écrit après le moine de Cantorbéry ont erré sur le nom de
l'archerbaliste en substituant successivement à celui de Jean Sabras, ceux de
Pierre Basile, reproduit, après Itier, par quatre chroniqueurs anglais du XIIIe siècle ; de
Bertrand de Gourdon, indiqué par Hoveden et Rigord ; enfin celui de Guy (Guidonem quendam), dont parle Guillaume Le Breton, mort en 1227
; comment et pourquoi préférer le récit de ces derniers à celui de l'écrivain
contemporain et croire que celui-ci seul s'est trompé en faisant blesser
Richard au siège de Nontron plutôt qu'à celui de Chalus ? Parce que, dit-on,
Itier affirme que le siège de Nontron et celui de Piégut ne furent résolus et
ordonnés par Richard qu'après avoir été blessé devant Chalus.
Mais, Itier
n'a-t-il pas ici commis au moins une confusion de faits et de dates en
reportant à 1199 la tentative faite en 1198 contre Nontron et la prise de
Piégut? Quelle nécessité pouvait-il y avoir, quelques mois après, à s'emparer
de nouveau de ce dernier château-fort, dont le haut donjon avait été déjà
démoli en partie ?
Comment
admettre, ensuite, que Richard, homme de guerre consommé, n'eût songé plus tôt
à l'utilité de s'emparer de Nontron pour assurer ses derrières ? Comment
comprendre que, alité et mourant, il eût eu l'idée de disséminer ses troupes au
moment même où il pouvait craindre le retour offensif de ses ennemis ? Ne
serait-il pas plus logique d'admettre qu'après la prise de Nontron, Richard y
avait laissé une garnison qui, à la nouvelle de la mort de celui-ci, se serait
empressée d'en déguerpir.
Mais, encore,
ajoute-t-on, tous les historiens anciens et modernes sont d'accord à faire
blesser Richard devant un château-fort de la vicomté de Limoges, avec ou sans
indication du nom de la localité. Parmi ces derniers, M. Arbellot en cite sept
du XIIIe siècle qui se
bornent à dire que ce roi fut blessé devant : Quoddam castrum,
cujusdem castelli ; apud castrum Lemovicense; castrum quoddam vicecomitis
Lemovicensis sans
indication de Nontron ni de Chalus. D'où la conséquence que Richard n'aurait
pas été blessé au siège de Nontron, cette place appartenant, d'après Gervais de
Cantorbéry, au comte d'Angoulême.
Alors, et tenant
pour vraie cette indication de Gervais, M. Dumazeau ajoute, à propos du traité
de 1198, venu à la connaissance de Richard : « Il porta donc la guerre, dans
les mois de février et de mars, chez le comte d'Angoulême et chez le vicomte de
Limoges et, parce qu'il faisait en même temps la guerre à ces deux seigneurs
qui étaient frères utérins), Gervais de Cantorbéry tomba clans une confusion de
lieux et indiqua Nontron, appartenant au comte d'Angoulême, au lieu de Chalus, château
du vicomte de Limoges, comme lieu où Richard avait été blessé à mort. »
M. Arbellot,
adoptant cette manière de voir, dit de son côté : « La découverte d'un trésor
est une légende sans valeur. La cause provient du traité d'alliance fait à
St-Yrieix en avril 1198... Voilà pourquoi Gervais de Cantorbéry, ayant par
erreur fait blesser Richard devant le château de Nontron (dont on fit le siège
effectivement pendant la maladie du roi), ajoute que le château appartenait au
comte d'Angoulême. Richard guerroyait, en effet, contre ses deux vassaux
d'Angoulême et de Limoges, et nous en savons la raison. »
A
ces dernières objections, il suffira de répondre :
1° Que Nontron
était qualifié de castrum dès le VIIIe siècle, et qu'au XIIe,
Chalus n'était encore qu'une petite bourgade protégée par un petit,
château-fort, castellutium,
d'où
chatelus
et,
par abréviation, Chalus,
d'après
M. Dumazeau.
2° Qu'au XIIIe
siècle Nontron n'appartenait point au comte d'Angoulême, mais qu'il dépendait
de la vicomté de Limoges; que si Gervais de Cantorbéry a commis, non pas une
erreur, mais une confusion, c'est en mettant, par un écart de plume, le mot
comte pour celui d'évêque. Nontron, en effet, appartenait bien réellement, pour
le domaine utile, au vicomte de Limoges, mais à la charge par celui-ci d'en
rendre hommage à l'évêque d'Angoulême. Le premier de ces hommages qui nous ait
été conservé est de 1243, suivi de plusieurs autres des années 1265, 1312, 1505
1514, 1620 et 1771, à cause du dit évêché et de la baronnie de La Penne, dont
la suzeraineté s'étendait non-seulement cle l'Angoumois au Limousin, mais
encore jusqu'en Poitou et Périgord. La ville d'Angoulême, où était sise cette
baronnie, appartenait, avant 839, époque à laquelle l'Angoumois fut érigé en
comté par Pépin II, roi d'Aquitaine, aux évêques qui, lisons-nous dans le Dictionnaire
historique de la France, par Lalanne, « avaient du céder tout ou
partie de la ville aux comtes, mais ils portaient le titre de baron de La
Plaine (lire La Penne) et avaient retenu la suzeraineté de plusieurs grands
liefs du diocèse. » Parmi ces fiefs figurait celui de Nontron ; ce qui explique
la confusion commise par le moine de Cantorbéry quant à l'indication du
seigneur suzerain, mais non quant à la place assiégée par Richard.
C'est vainement,
enfin, qu'à la fable des statues d'or, l'imagination et la tradition populaires
vont jusqu'à offrir à la curiosité des touristes la visite d'un rocher sur
lequel se serait tenu Richard, au moment où il aurait été blessé, et auquel on
a donné, comme preuve de certitude, le nom de Maulmont, l'un des anciens
seigneurs de Chalus. C'est en vain que cette autre fable a été recueillie et
reproduite par les écrivains modernes, notamment par l'Histoire des
villes de France, de Guibert, en ces termes : « On voit
encore de nos jours les hautes tours de l'antique château de Chalus et la
pierre de Maulmont (malus mons), sur laquelle
Richard Cœur-de-Lion fut, à ce qu'on affirme, frappé par la flêche de Bertrand
de Gourdon. »
Ce dernier
détail est, en effet, aussi inexact que les premiers; car, en 1199 et au moment
du siège, Chalus n'était qu'une petite bourgade, défendue par le château-bas
dit de Chabrol, dont il n'existe plus qu'une tour dominant le vallon où se
trouve la pierre en question ; et ce n'est qu'après 1294, époque à laquelle une
partie de la seigneurie de Chalus fut donnée à Gérard de Maulmont, que celui-ci
y lit construire le château-haut dit de Maulmont, dont une tour est également
debout. Il ne s'agit donc pas aujourd'hui d'un seul château, mais de deux, et
si on a donné au second le nom de son fondateur, on ne saurait, sans un
anachronisme évident, attribuer ce nom à des objets et à des événements
antérieurs de près d'un siècle.
En résumé, il
nous parait plus sûr et plus rationnel de préférer le simple récit du
chroniqueur contemporain aux détails plus ou moins romanesques de tous ceux qui
ont suivi : et nous persistons à penser qu'après la prise de Nontron, où il fut
blessé légèrement, Richard, continuant sa route sur Limoges, son objectif
principal, en partit pour aller, à quelques heures de marche, assiéger Chalus,
où il mourut, disent les historiens, de sa négligence à soigner sa blessure,
ainsi que de ses excès. »
Quelques années
plus tard et en 1202, Guy V, vicomte de Limoges, se déclara ouvertement pour
Philippe-Auguste, roi de France, contre Jean Sans-Terre, roi d'Angleterre. Il
s'empara de Limoges et fit prisonniers les principaux bourgeois, qu'il envoya
dans les prisons d'Aixe, de Nontron, de Ségur et d'Excideuil. (Marvaud.)
De 1202 à 1346,
continuation des hostilités entre les vicomtes de Limoges et le roi
d'Angleterre, pendant lesquelles la ville de Nontron, bien qu'il n'en soit
question qu'en 1346, époque à laquelle les Anglais s'en empareront, sous le
commandement de Falconnet, bâtard du Périgord, eut à en souffrir plus d'une
fois, d'après le document suivant :
« 1347. - Lettres
de Jean de Monfaucon, capitaine général et séneschal pour le roy en Périgord,
par lesquelles il permet à
Yctier de Maignac et sa
femme se retirer en leurs biens qu'ils avoient à Nontron, desquels ils avoient
été spoliés par les Anglais au temps des guerres. Données à Périgueux, decimo tertio aprilis, anno
domini trecentesimo septimo ». (Doat,
v. 241.)
Il résulte aussi
de ce document et des suivants que Nontron fut souvent repris aux Anglais avant
ou après 1346 :
« l350, 12 mars. - Lettres de Jeanne de Bretaigne,
vicomtesse de Limoges, ordonnant au receveur du Limousin de faire jouir (juy et
Jean de Lestrade, de certaine
grâce que fisme autrefois a leur père sur les esmoluments des papiers de nostre
ville de Limoges et que nous leur faisons aujourdhuy solution et payement de
certaines sommes dor et dargent et de blets a eux deues, lesquelles leur dict
pere, au temps quil vivoit, presta a maistre Guilhaume de La Marche, nostre
cousin et seneschal de Limosin, a cause des guerres de par delà. » (Doat, v.
243.)
Dans le premier
volume de la collection Doat, les mêmes lettres sont ainsi relatées :
« 1350. — Lettres de Jeanne, duchesse de Navarre,
ordonnant au receveur de Limoges de payer a Jean de Lestrade huictantes livres
par année sur les émoluments du papier de Limoges, pour les sommes que son père
avoit preste à Guilhaume de La Marche pour le recouvrement des chasteaux de
Nontron et d'Ans, du 12e mars. »
« 1336. — Affièvement d'une maison dans les
faubourgs de Nontron par Jehan de Montbouchier, sénéchal de Limoges, en faveur
de Geoffroy du Bois, a reson de la garde du chasteau de Nontron dou temps
passe... .
De 1354 à 1356,
prise de Nontron par les Anglais et reprise par les Français, ainsi qu'il
appert du document suivant du 29 mai 1357, rapporté par Doat, v. 241 :
« Lettres de main-levée signées, scellées et
octroyées par Charles de Bretaigne, vicomte de Limoges, a messire Ictier de
Maignac, chevalier, de tous les biens qu'il avoit, tant en la chastellenye de
Nontron que ailleurs par toutte la ditte vicomté, pour ce que le dit de Maignac
estoit accusé davoir este cause de rendre le chasteau de Nontron entre les
mains des ennemys du dit vicomte. Données à Avignon, le vingt neufviesme jour
de may 1357. »
En 1360, et par
le traité de Brétigny, le Limousin fut abandonné à Edouard III, roi
d'Angleterre, et Jean Chandos, son connétable, en prit possession en 1361.
Trois ans après et en mai 1364, le prince de Galles et sa femme entrèrent à
Limoges, pendant que leurs hommes d'armes, sous les ordres d'Hélie de Lestrade,
occupaient le château de Nontron, et que d'autres s'établissaient dans
Excideuil, à Ségur, à Aixe, Château-Chervix et autres places. (Marvaud.)
De 1300 à 1309,
il résulte du compte de Richard Filongley, receveur de l'illustrissime seigneur
Edouard, prince d'Aquitaine, publié par M. Jules Delpit, que les Anglais furent
maîtres de Nontron, qui y figure au chapitre de la vicomté de Limoges, sous le titre
de : castellania
de Nontronio et Podio acuto,
pour
les années 1363 à 1368. Les années 1369 et 1370 ne portant aucun chiffre, il
faut en conclure que Nontron se débarrassa des Anglais en 1369, après la
rupture, en 1368, du traité de Brétigny.
Cependant M.
Marvaud nous apprend que : « Le 19 septembre 1370, le prince de Galles prit
d'assaut la ville de Limoges, ayant sous ses ordres, parmi les principaux
seigneurs et Gascons qui suivirent sa bannière... Geoffroy de Nontron, à qui il
avait donné ce fief de la vicomté..., » ce qui ne prouverait cependant point
que les Anglais en fussent restés maîtres, le dit Geoffroy ayant dû en être
expulsé avec eux.
A partir de 1370
jusqu'en 1407, il ne parait que Nontron ait revu les Anglais qui, en 1372,
harcelés de toutes parts, furent chassés du Limousin et du Périgord, où ils
n'occupaient plus que quelques places en 1380. Ce fut dans cet intervalle que
Duguesclin passa à Nontron en août 1377, pour aller assiéger et prendre près de
là les châteaux de Bernardières et de Condat,
Mais en 1407,
les Anglais se rendirent de nouveau maîtres de la ville de Nontron, qu'ils
incendièrent en partie, après l'avoir pillée.
Aussi, et le 10
juin 1410, après la reprise de cette ville, le roi de France, Charles VI, en
récompense de leurs loyaux et bons services, accorda-t-il aux habitants de
Nontron des exemptions d'impôts, et ce par lettres patentes, dont la teneur
suit :
« Charles,
par la grâce de Dieu, roy de France, au seneschal de Pierrogort ou a son
lieutenant, receue avons humble supplication de nos bien ames les manans et
habitans de la ville, chastel et chastellenie de Nontron, en la seneschaussee
de Pierregort, contenant que jasoit que ils qui sont en pays de guerre de
frontière, ayent eu ou temps passé tellement a souffrir par nos guerres,
passamens et chevauchées de gens darmes, et stérilités de fruicts, mortalités,
pour payer les grands fouaiges, subcides que ont eu cours ou temps passe au
dict pays, et pour supporter les aultres grans et innumerables charges qui leur
a convenu supporter et convient encore. Et pour ce que aussi depuis trois ans,
en ca, les dicts Anglois ont pris par eschellement la dicte ville, ycelle
pillée, desrobee et boute le feu, tue, meurtri et emprisonne plusieurs des gens
dicelle ville et chastellenie ; quils nont bonnement de quoy vivre et sont
envoyés yceulx suppliants deux aler hors du pays, et de sousier la dicte ville
comme inhabitable. De laquelle ville qui est moulte grande, fourte et
spacieuse, et du chastel qui est aussy moult grant, fort et spacieux et comme
inexpugnable, se ils estoient prins et occupes par nos ennemis que ja ne
adviengue tout le pays denviron poroit estre et seroit du tôt désert, destruit
et gaste. Combien aussy que selon raison yceulx supplians ne doibvent, ne soient
tenus de contribuer que pour leurs parts et portions auxquelles ils ont estes
taxes et imposes pour les fouaiges, subcides et tailles qui ont eu cours en la
dicte seneschaussée, et ycelles parts et porcions payées, yceulx supplians
doient demourer quittes et paisibles diceulx fouaiges, subcides et tailles.
Néanmoins, pour iceulx mesmes fouaiges, subcides et tailles imposes au dioceze
de Limoges, len a impose et levé sur yceulx supplians plusieurs et grands
sommes de deniers et leur ont este et faictes plusieurs vexations et
molestations soubs ombre de ce que ycelle ville est assise au dioceze de
Limoges ou autrement. Pourquoy yceulx supplians ont este et sont contrains a
contribuer a yceulx subcides et tailles qui sont mis sus et ont cours au dict
pays deux fois a tort et contre raison. Et pour ce ont este et sont tellement
vexes et molestes les dicts supplians quils nont bonnement de quoy vivre et
sont en voye destre du tout mis a pouvrete se par nous ne leur estoit sur ce
pourvoir dopportun et convenable remède, si comme ils dient requérant sur ce
nostre provision. - Pourquoy nous, en considération aux choses dessus dictes,
qui voulons préserver nos subjects de toute vexation, peines et travails, a
yceulx supplians avons octroyé, et octroyons de grâce spécial par ces
présentes, que doresnavant ils ne soient mis, imposes pour yceulx fouaiges,
subcides et tailles, auxquels ils auront este mis et imposes par la dicte
seneschaussée pour leurs dictes pourcions que pour une foys, et que en payant
leurs dictes pars et porcions ils soient et demeurent toujours quittes et
paisibles de tous et chascuns yceulx fouaiges, subcides et tailles, sans que
pour la dicte dioceze ils soient tauxes, vexes, molestes ni inquiétés
aucunement. — Si vous mandons et pour ce que la dicte, ville est assise en
vostre seneschaussée, commettons et étroitement enjoignons que vous faites
rendre et restituer et mettre à plaine délivrance a yceulx supplians leurs
biens et gaiges pour ce pris, saisis et arrestes, et empochiez de nostre
présente grâce, faites, souffriez et laissiez les dicts supplians joyr et user
paisiblement en faisant, en cas dopposition, refus, contredit et delay, a
ycelles parties oyes sommairement et de plain et en assise, et dehors bon et
brief accomplissement de justice.
Mandons et commandons a lous nos justiciers,
officiers et subjies que avons commis et députes en ce faisant obéissant et
entendant diligemment, car ainsi nous plaist il estre faicts. Et aux dicts
supplians lavons octroyé et octroyons de grâce spécial par ces présentes,
nonobstant stille et usatge, quant attendre d'assise et quelconques lettres
subreplices, empestrees ou a empestrees a ce contraire. Donne a Paris, le
dixiesme jour de juin, lan de grâce mil cccc et dix, de nostre règne le xxx...
» (Bibl. nat., coll. du Périgord, v. 47, f° 237. - Archives des
Basses-Pyrénées.)
Ce fut
probablement à cette occasion que les habitants de Nontron obtinrent aussi du
roi de France la faveur de porter des fleurs de lys dans les armes de la ville,
qui sont : d'azur
à une tour d'argent, maçonnée de sable, accostée de deux fleurs de lys d'or.
De 1417 à 1418,
Olivier, fils aîné de Jean Ier et de Marguerite de Clisson, ayant
voulu, à l'instigation de sa mère, renouveler ses prétentions sur le duché de
Bretagne, cette province se souleva et le chassa de son duché de Penthièvre.
Obligé de se retirer dans ses terres de Flandre, Olivier nomma Jean de
Bretagne, dit de l'Aigle, son frère, son lieutenant général dans la vicomté de
Limoges, et, d'après Doat, v. 243, celui-ci se retira, avec sa mère, en
Limousin, où, dit-il, ils arrivèrent en «assez triste équipage ; ils avoient
très petit revenu et estoient contraints de tenir pauvre estat. Ils
s'installèrent dans une place qui leur appartenoit, Nontron, qui estoit pour
lors destruite et déserte, quasi inhabitable. »
En 1421, Jean de
Bretagne séjournait encore à Nontron, car le 17 mars de cette même année, et
par acte passé à Nontron, le dit Jean : « Eu égard aux grands et notables
plaisirs, amour, honneurs et services que Audoin de Pérusse, seigneur des Quars
et de la Cossière, son cousin, et les siens ont fait au vicomte de Limoges lui
donna la justice des villages de Faye et La Borda. » (Doat.)
« En 1426,
dit M. Marvaud, Jean de Bretagne voulant s'emparer par ruse de la ville de Limoges,
dont les habitants refusaient de le recevoir, s'entendit avec quelques
bourgeois et vint dans la nuit du 25 août, près de la porte des Arènes escorté
de trois cents lances et de trois mille hommes de pied, commandés par Jean de
Laroze, Daniau, Bernardières, Aubeterre, Clayes, Rocheval et Nontron, tous
nobles chevaliers du Limousin, d'Angoumois et du Périgord. »
De 1426 à 1434,
trêves et hostilités successives entre les bourgeois de Limoges et Jean de
Bretagne, devenu vicomte, et pendant lesquelles celui-ci « courait du château
de Nontron à Saint-Yrieix, d'Aixe au château de l'Isle. » (Marvaud.)
En 1441, Nontron
appartenait encore au dit Jean de Bretagne, qui y consentit, le 12 avril de
cette année, avec dame Marie Colette, veuve d'Aymard de La Porte, un échange de
maison, reproduit au chapitre de la construction de Nontron.
De 1441 à 1453,
époque à laquelle cessèrent les guerres anglaises, Nontron parait être resté
toujours en la possession de Jean de Bretagne, qui se plaisait à y séjourner
souvent, comptant sur le patriotisme et la fidélité de ses habitants. Il fut
d'ailleurs, l'un des premiers hommes de guerre de ce temps-là, d'après tous les
historiens et d'après un mémoire judiciaire de 1779, dont nous avons la
satisfaction de pouvoir reproduire l'extrait suivant :
« Olivier fut
chassé du duché de Penthièvre et obligé de se retirer dans les terres qu'il
avoit en Flandre. C'est de là qu'il assigna, en 1432, à
Jean de Bretagne, seigneur de l'Aigle, son frère puiné, pour lui tenir lieu de
sa portion héréditaire, le vicomte de Limoges et ses dépendances, dont le
connétable du Guesclin lui avoit assuré la possession par ses conquêtes. Devenu
vicomte de Limoges, Jean de Bretagne, à l'exemple de ses aïeux, se voua
entièrement au service de la France... Les Anglais, qu'il poursuivait avec
autant d'activité que de valeur, ayant ravagé ses domaines, Charles VII lui donna, en 1446, à
titre d'indemnité, toutes les tailles qu'il pouvoit exiger dans le Limousin[5]. Choisi,
en 1448, pour commander les armées du roi en Guienne, il
assiégea la ville de Bergerac au mois de seplembre 1450, et la
réunit à la France après un mois de siège. En 1451, il assiégea Castillon, qui
capitula bientôt. Castillon pris, il attaqua les forteresses de Chalais et de Saint-Emilion,
qu'il emporta d'assaut. Il se trouva à la bataille, perdue par les Anglais sous
les murs de Castillon, en 1453
; il servait alors sous
les ordres du fameux comte Dunois, ce fléau de l'Angleterre; il fit des
prodiges de valeur. Il ne cesssa oncques de tuer des Anglais, dit Monstrelet,
jusqu'auprès de Saint-Emilion. Il donna de nouvelles preuves de ses talents et
de son zèle pour la patrie à la prise de Bordeaux. Il mourut sans enfants, en 1454, et
fut enterré dans le couvent des Frères mineurs d'Excideuil. »
Guillaume, que
Nadaud qualifie de seigneur de Nontron, succéda à Jean de Bretagne, son frère,
et, de son mariage avec Isabeau de La Tour, il n'eut que trois filles, dont
Françoise, l'aînée, qu'il institua pour son héritière universelle par testament
du 24 août 1454, épousa Alain d'Albret, surnommé le Grand. C'est ainsi qu'avec
le comté de Périgueux, acquis par Jean en 1437, et la vicomté de Limoges, la
seigneurie de Nontron passa dans la maison d'Albret.
La possession de
Nontron par les Anglais, à divers intervalles et pendant des périodes plus ou
moins longues, notamment pendant la vie du prince de Galles, est donc
incontestable, et d'ailleurs surabondamment prouvée par la découverte de
diverses monnaies de l'époque. C'est ainsi qu'en 1854, lors des fouilles
pratiquées pour la construction du grand pont reliait le quartier du fort avec le plateau de
la forteresse, on trouva dans le mur de défense de ce quartier un tas
d'anciennes monnaies en argent, au nombre de 749, dont 12 pièces de Flandre, 8
de la maison d'Orange, 23 monnaies françaises du XIIIe siècle, et
tout le reste en hardits et doubles hardits du prince Noir, frappés à Limoges
en 1370.
Si, des faits
positifs nous passons à la tradition populaire, celle-ci nous apprend que les
Anglais, chassés de Nontron et poursuivis sur le chemin de cette ville aux
Isles, en côtoyant le Bandiat, vers Angoulême, furent atteints au Terme de la
Graule, où ils eurent à peine le temps d'enfouir la caisse de l'armée, contenant
quarante millions. Ce Terme de la Graule est à quatre kilomètres environ de
Nontron, à droite et sur la nouvelle route de cette ville à Javerlhac et à
Angoulême. Pas n'est besoin d'ajouter que ce trésor, dont j'ai souvent entendu
parler dans ma jeunesse et par les anciens de l'époque, est encore à trouver.
Enfin, la
mémoire de Jeanne d'Arc était autrefois vivace dans nos campagnes, où l'on
chantait, à la veillée, une sorte de complainte en patois, dans laquelle il est
question d'une bergerette
qui,
du premier coup de sa quenouillette, fit tomber le
roi d'Angleterre, et dont nous ne nous rappelons que ces quelques vers :
D'au prumier cot
donna, pitit rey toumbo a terro,
Què doun
Què dit-ello doun ?
Pilit rey toumbo a terro !
Courage mous amis, nous n'aurans pus de
guerro
Què doun
Què dit-ello doun ?
Nous n'aurans pus de guerro,
Lou pitit rty ey mort, pitit rey
d'Angleterro.
Que doun
Què dit-ello doun ?
Pitit rey d'Angleterro !
3°
Hostilités
seigneuriales. - Maintenant,
revenons à Alain d'Albret, devenu seigneur de Nontron, et aux nouvelles
catastrophes qu'il attira sur cette ville, d'après le Nobiliaire de l'abbé
Nadaud, où nous lisons ceci :
« Le 10 février 1485, Alain d'Albret se ligua contre
le roi de France. En 1487, il assembla environ trois à quatre mille
combattants, avec lesquels il prétendait venir joindre les princes mécontents
de Bretagne. Mais le seigneur de Candale, lieutenant du roy en Guyenne,
l'investit dans son chasteau de Nontron, sur la frontière du Limousin et de
l'Angoumois, et l'enveloppa de telle manière qu'il n'eut point d'autre parti à
prendre que celui de la soumission, obligé de venir à composition, de retourner
dans ses terres de Gascogne et de licencier son armée[6] ».
Dans l'Histoire de
France de
Garnier, vol. XX, p. 21, nous lisons encore :
« Il (Alain d'Albret) se trouva investi dans
le château de Nontron par le seigneur de Candale, lieutenant du sire de Beaujeu
en Guyenne. Réduit à capituler, il demanda pardon au roi, congédia sa troupe et
promit d'être fidèle à l'avenir. »
4° Guerres de
religion. - En
1552, commencèrent, sous prétexte de religion, les hostilités des derniers
partisans de la féodalité contre l'unité française, et Nontron eut
particulièrement à en souffrir quelques années après. A ce sujet et, dans son Histoire
universelle, t.
V, p. 521, de Thou rapporte que :
« Coligny s'étant mis en marche pour faire sa
jonction avec le duc des Deux-Ponts, détacha Antoine de La Rochefoucauld pour
se saisir de Nontron, qu'il emporta d'emblée le 7 juin 1569 et passa la
garnison au fil de l'épée, après quoi ils continuèrent leur marche. »
L’Histoire
d'Aquitaine donne
la même date et nous apprend que la garnison de Nontron ne se composait que de
quatre-vingts hommes, et que la ville fut prise par Antoine de La
Rochefoucauld.
Le Périgord
illustré dit
aussi que Nontron fut pris en 1509 par le même capitaine.
Mais l'Annuaire de la
Dordogne de
1806 dit : « L'armée de l'amiral Coligny, réunie aux reitres huguenots du
Limousin, prit et saccagea Nontron en 1570. Les habitants s'étaient défendus
jusqu'à la dernière extrémité, et un grand nombre fut massacré par le
vainqueur. »
Nous lisons
enfin dans l'Histoire
des Villes de France, au sujet de la prise de Nontron :
« En 1370, Coligny, à la tête des réformés français
et des reitres réunis s'en rendit maître après une vigoureuse résistance de la
part des habitants. Le courage des vaincus, loin de désarmer les vainqueurs, ne
fit que les irriter contre eux. Un grand nombre périt par le fer et la ville
fut saccagée ».
Ici
s'impose une question, celle de savoir si la prise de Nontron par les huguenots
eut lieu le 7 juin 1569 ou en 1570 ?
Or, les deux
derniers historiens, tous les deux du Périgord, n'ont dû adopter cette date de 1570
que d'après un extrait des registres de l'hôtel de ville de Périgueux, imprimé
au XVIIIe siècle et
contenant un état des troupes de la ville, d'après la revue faite en 1570. Dans
cet état, qui ne porte aucune indication ni de mois, ni de jour, et après
l'énumération des hommes armés et d'une escarmouche contre les reitres
huguenots à Saint-Germain, près Saint-Benoist, cinq lieues de Périgueux, on lit
ce qui suit :
« En ces jours, l'armée de l'amiral fendit le chemin
de Lymosin pour s'en aller joindre avec leurs reitres, et en passant firent
mille maux ; thuaire les passans hommes, femmes, petits enfans, et cherchoient
parmi les bois et bleds, voloient maisons et églises, avec plusieurs volleries
et sacagements de fait, prindrent et pillarent la ville de Nontron, ou les
habitans s'estoient défendus tant qu'ils eurent moyen de pouldre, et affin
soubs la faveur de la nuict se saulvarent aulcuns en la présente ville et
alheurs... »
Or, il nous
semble dès à présent que le magistrat chargé de la revue de 1570, en parlant de
la prise de Nontron à l'occasion du passage de l'amiral sur « le chemin du
Lymosin, pour s'en aller joindre les reîtres », a eu en vue un événement
antérieur de plusieurs mois. L'histoire nous apprend, en effet, qu'après la
bataille de Jarnac du 13 mars 1569, Coligny se retira à Saint-Jean-d'Angély,
puis à Tonnay-Charente d'où, après quelques mois de repos, ayant appris que les
Allemands, sous la conduite du duc des Deux-Ponts, avaient passé la Loire, il
se mit en marche pour aller au-devant d'eux. C'est alors que l'armée des
princes, venant de l'Angoumois en Périgord, pour aller en Limousin, et passant
près de Nontron, l'amiral détacha Antoine de La Rochefoucauld pour en faire le
siège, tandis que le gros de l'armée, se dirigeant sur Chalus par la
Grande-Pouge, prit et saccagea le bourg de Saint-Pardoux-la-Rivière. Deux jours
après la mort du duc des Deux-Ponts, arrivée à Nexon le 18 juin 1569, les deux
armées calvinistes firent leur jonction à Chalus, et en repartirent bientôt
pour aller à Aixe et, de là, à Laroche-l'Abeille, où, le 24 dudit mois de juin,
elles battirent les catholiques. Après quelques mois de séjour en Limousin, les
huguenots en décampèrent et s'emparèrent, en passant, de Thiviers, de La
Chapelle-Faucher, de Brantome et de Château-l'Evêque, (Mézeray, de Thou). Ces
derniers événements durent, sans aucun doute, se produire dans les premiers
jours de 1570 ; ce qui donna lieu à la prise d'armes et à la revue des
habitants de Perigueux, menacés de près par les calvinistes, campés à
Château-l'Evêque.
De ce qui
précède, il nous parait donc suffisamment résulter que la prise de Nontron par
les huguenots eut lieu le 7 juin 1569, et non en 1570.
Les calvinistes
campèrent au sud-est de cette ville, près de la route conduisant à Chalus et
sur le plateau où se trouve l'enclos de l'hospice actuel, lequel plateau prit,
à partir de cette époque, le nom de Terre de l'Amiral, et la colline où il se
trouve celui de Puy-aux-Loups, en patois : Pouyouloux, d'après divers
actes des XVIIe et XVIIIe siècles,
pendant que les terrains adjacents recevaient la dénomination caractéristique
de Mataguerre
(grand
combat), conservée par le cadastre.
Au surplus, les
troupes calvinistes ne reparurent plus devant Nontron, qui, en 1575, devint un
lieu de refuge pour une partie des habitants de Perigueux, après la surprise de
cette ville par Langoiran et Vivans, le 6 août de cette année, ainsi qu'il
résulte de cet extrait du manuscrit de Jean de Chillaud, sr des
Fieux :
« Du sixiesme
d'aoust 1575, prinse de la ville de Perigueux par les huguenots, commandés par
le sieur de Langoiran, par surprise et trahison de divers personnages, et
entr'autres de François Faure, sieur de Lussas... Les habitants catholiques qui
en avoient été chassés et qui sortaient à-mesure quils avoient payés leur
rançon, sans prendre autre chose de leurs biens et se réfugioient en lieux
circonvoisins pour y vivre en assurance, ainsy que leurs commodités leur
pouvoient permettre, ainsy aux villes de Brantolme, Nontron... ,
5° La Ligue. — Pendant la Ligue
de 1576 à 1593, les protestants et les ligueurs, disent les historiens, furent
plusieurs fois débusqués de Nontron, notamment par d'Epernon, qui s'en empara
définitivement en 1589 et en démantela les fortifications.
6° Croquants. -
En 1633, nouvelle révolte des Croquants en Périgord, et particulièrement en
Nontronnais, où ils furent soumis, en 1636-37, par le duc d'Epernon, ayant sous
ses ordres M. de Folleville, qui établit à Nontron son quartier général. C'est
ce qui résulte d'une relation, imprimée à Angoulême en 1552, et dont nous
donnons l'extrait suivant :
« Ce pays
étoit tombé dans une si grande consternation quil salloit jetter dans une
révolte généralle, si le zèle et la fidelitté des plus considérables
gentilshommes de la province et les villes de Nontron et de Tiviers ne les eust
engagé à prier M. de Folleville dy entrer pour secourir leurs bonnes
intentions... »
Suit la défaite
des Croquants au siège du château de Condat, dont nous parlerons au chapitre du
canton de Champagnac-de-Bel-Air.
7°
La
Fronde. - Plus
tard, de 1648 à 1653 et durant la Fronde, les habitants de Nontron, tenant
toujours pour le roi et l'unité française, eurent encore à se signaler plus
d'une fois, et leur ville devint le quartier général des troupes royales,
d'après les documents suivants :
Du 10 juin 1650,
lettre datée de Confolens et écrite au cardinal de Mazarin par le maréchal de
La Meilleraye, qui lui mande entr'autres choses :
« J'ai
en vue Limoges et Angoulesme et fais advancer tout ce qui nous est nécessaire
pour notre petit équipage, afin que lundi nous puissions estre a moitié chemin
de Périgueux, a un lieu qui s'appelle Nontron où je fais mon rendez-vous
général. (Archives de la Gironde) ».
En 1651,
Périgueux ayant été pris par le prince de Condé, les sièges royaux furent
transférés à Nontron où ils restèrent jusqu'en octobre 1653, ainsi qu'il appert
des actes civils de cette ville, où l'on trouve : à la date du 14 août 1652,
l'acte de baptême de la fille de « Monsieur maistre François de Simon, escuyer,
sieur de Chatillon, conseiller du roy et président au siège royal de Périgueux,
et de dame Jeanne Martin, parrain Mr Me de Vincent, sieur de Laborie, escuyer,
conseiller magistrat audit siège ; et autre baptême du 17 août 1653, de Léonard
Deyriaud, fils de M. Me François Deyriaud, conseiller du Roy en l'élection de
Perigueux. C'est ce qui résulte aussi et péremptoirement du traité fait à
Perigueux, le 1er octobre 1653, entre le duc de Candale, général en
chef des armées royales, et les maire, consuls et citoyens de Perigueux, où il
est dit à l'art. III : « Les sièges royaux seront rétablis et conservés dans la
dite ville sans s'arrêter à la translation qu'en a esté faicte en la ville de
Nontron, laquelle demeurera pour non-advenue et sans aucun esfaict. »
Quelques mois
avant et en juin 1653, le marquis de Sauvebœuf avait son quartier général à
Nontron, d'où il fit expédier le 5 dudit mois de juin des lettres de sauvegarde
à Jacques de St-Astier, « servant pour le Roy contre les Frondeurs qui prirent
son chasteau des Bories, près Périgueux, et ravagèrent ses biens. »
Parmi les
personnages de Nontron et des environs qui se signalèrent pendant la Fronde et
les troubles antérieurs, au service du roi, nous trouvons :
1° François de
Conan, seigneur de Connezac, auquel le maréchal de Folleville, commandant pour
le roi sous l'autorité de S. A. M. le duc de Candale, délivra les lettres de
sauvegarde ci-après :
« Mandons et ordonnons à lous ceux sur qui
nostre pouvoir sestend et prions tous autres quil appartiendra de ne loger ny
fourrager dans les paroisses de Connezac et Hautefaye, lesquelles a la prière
et considération du sieur Depasvieux nous avons mises et mettons soubs la protection
du Roy et la nostre, ayant chargé le sieur de Connezat de nous informer
ponctuellement de ceux qui auront eu considération a nostre sauvegarde
promettant faire le semblable quand en seront requis de leur part. En tesmoins
de quoy nous avons signe le présent, y fait apposer le sceau de nos armes et
contresigner par nostre secrettaire a Nontron, ce deuxsiesme demay 1653. Signé
Folleville Lesens ; par monseigneur, Coustain ».
2° Thibault de
La Brousse, seigneur de La Pouyade, beau-frère de Joseph Bodin, qui commandait
un régiment de cavalerie posté auprès de Perigueux et par l'entremise duquel
ledit Bodin correspondait avec les marquis de Sauvebœuf et de Thourailles,
commandant les troupes royales campées dans les plaines de
St-Laurent-sur-Manoire, en septembre 1653.
3°
Dans le catalogue des nobles de l'Élection de Périgueux, dressé par M. Pelot,
intendant de Guyenne, de 1664 à 1667, figurent : « François, Simon, autre
François de La Roussie, originaires de Nontron, anoblis par lettres de l'année,
à cause des services considérables qu'ils ont rendus pendant les mouvements
derniers et des grandes pertes qu'ils ont soufferts pour le service de sa
majesté. »
Nous aurions,
sans doute, beaucoup d'autres noms à ajouter à ceux qui précèdent, et nous
regrettons de ne pouvoir le faire, en ce moment, à défaut de documents
suffisants. Nous faisons donc appel aux familles du Nontronnais, qui auraient
intérêt à nous communiquer les leurs et à en assurer ainsi la conservation.
4° Quant aux
habitants de la ville de Nontron, sans distinction de classes, ils tinrent à
honneur de servir la cause du roi de France contre les frondeurs, comme ils
l'avaient déjà fait contre les Anglais et contre les huguenots, et les reitres
allemands, leurs alliés, ainsi qu'il résulte de l'exemption d'impôts qui leur
fut accordée le 5 mars 1654 par le roi Louis XIV et dont la teneur suit :
« Sur ce qui a esté représenté au Roy en son
conseil par les habitans de la ville de Nontron en Périgort, que sa ville de
Périgueux, cappitale du pais s'estant déclarée pour les ennemis de l’estat, ils
furent exhortez par les chefs du party rebelle de suivre leur pernicieuz
exemple, et pour ny avoir voulu consentir, menassez de ruyne. Mais comme ils
n'ont jamais eu de plus forte passion que de vivre tousiours dans la fidélité
qu'ils doivent a sa maiesté, dans les temps mesme ou ses rebelles suiets
croyoient qu'il n'y eust aucune puissance qui leur put résister, les dicts
habitans de Nontron, de leurs propres mouvements, furent au devant du sieur de
Sauvebeuf pour le prier de faire entrer ses trouppes dans le Périgort, par la
dicte ville de Nontron, ce qu'il lit. et après y avoir vescu plusieurs jours,
aux despens des habitans avecq ses deux régimens de cavallerie et d'infanterie
et quantité de volontaires, et pris le pain de munition pour leur subsistance,
la dicte ville lui fournit huict vingts cavaliers et soldats, tous bien montez
et armez ; lesquels oultre six vingts habitans qui avoient pris party dans les
trouppes de sa majesté, curent l'honneur d'assister aux prises des Chasteau
l'évesque et Agonnat, et ensuite aux attaques et prises de Razac, Montanceis,
Rougnac, St-Paul et la Tour-Blanche, notamment a la deffaitte générale du
pariage; Ayant en ces occassions et généralement en toutes les autres qui se
sont passées en Périgort et lieux circonvoisins, particulièrement soubs la
conduitte du dict sieur ,1e Sauvebeuf et des sieurs de Foleville et Bousquet
Chavagnac, donné des preuves évidentes de leur courage, gardé le chasteau de
Bourdeille que le sieur de Bessay n'auroit voulu confier qu'à leur fidélité,
souffert avecq plaisir divers logemens des trouppes de sa maiesté, tant de
cavallerie que d'infanterie, payé lous les arrérages des tailles, fourny de
contributions, pain, poudre, plomb et munitions, nourry long temps plusieurs
prisonniers de guerre, repoussé diverses fois les ennemis, et en ces occasions
randu de plus grands services à sa maiesté que ville de Guienne ; et parce que
les ennemis avoient dessain d'attaquer la dicte ville de Nontron pour s'en servir,
affin de faire des courses dans les provinces d'Angoumois, Poitou et Limousin,
desquelles elle est limitrophe, le sieur marquis de Montauzier y avoit mis pour
commandant le sieur de La Tour, par les ordres duquel ils auroient fortiffié la
dicte ville, le fort d'icelle et le chasteau d'Albret qui la commande, appelé à
leur secours diverses fois cinq à six cents de leurs voisins qu'ils avoient
faict subcister, mis à couvert plusieurs lieux qui sans eux auroient esté la
proye des ennemis, et par ce moyen maintenu dans l'obéissance de sa maiesté
plus de trois mille hommes qui panchoient à la révolte, ce qu'ils n'ont pu
faire sans se consommer en de grandes despances. Oultre lesquelles après avoir
souffert plusieurs logemens, ils furent obligez de fournir la subsistance,
ordonnée par le sieur duc de Candale, aux deux régiments du sieur de Sauvebeuf
et aux trouppes de Plevixe et du comte Philippes ; montant et suivant la
liquidation qui en fut faicte par les esleuz, à la somme de dix mille cinq
cents livres, et de laquelle ils n'ont pu tirer aucun payement du receveur des
tailles, bien que le dict sieur duc de Candalle leur aye donné ordonnance pour
cest effect le XVIII avril dernier, ce qui causerait la ruyne totale de la
dicte ville de Nontron si elle n'estoit rembourcée de la dicte somme ; et si sa
maiesté ne la mettait à couvert de la haine des esleuz de Perigueux, la
pluspart desquels estoient dans la rébellion, et qui la veulent surcharger
annuellement de taille et autres impositions, pour avoir esté la seule qui
s'est généreusement opposée à tous les dessains de la dicte ville de Perigueux,
et qui a mieux servi sa maiesté que ville de Guienne, ainsi qu'appert par les
certifficats des lieutenans généraulx et des mareschaulx de camp de son armée
de Guienne Au moyeu de quoy requerraient qu'il pleust à sa dicte maiesté les
vouloir descharger doresnavant
de toute taille, taillon, droicts d'officiers et autres impositions qui ce
peuvent faire durant le cours de l'année, ou du moins les reigler au quart des
dictes impositions de l'année dernière, montant le dict quart, suivant les
mande ou commission, à la somme de huit cens quarante cinq livres ; faire
inhibitions et deffances aux dicts esleuz de taxer la dicte ville et paroisse
de Nontron à une somme plus haute, à peyne de suspension de leurs charges, et
de tous despens, dommages et intérests. Et en outre ordonner qu'il sera par eux
imposé l'année présente sur tous les contribuables de la dicte eslection, la
dicte somme de dix mille cinq cens livres, à quoy monte la subsistance fournie
aux régimens de Sauvebeuf, trouppe de Plevix et comte Philippes, suivant
l'ordonnance du dict sieur duc de Candalle du dict jour XVIII avril dernier,
pour estre la dicte somme receue par le receveur des tailles en exercisse, et
par lui payée aux sindiqs et consuls de la dicte ville de Nontron sur leurs
quittances a la partie de l'espargne, nonobstant, sans s'arrester aux deffenses
portées par les commissaires des tailles, auxquelles il plairait à Sa Majesté
de vouloir desroger pour ce regard. Veu la dicte requeste et les certifficats
des services rendus à sa majesté par les habitans de la dicte ville de Nontron,
ordonnance du sieur duc de Candalle sus énoncée, le procès-verbal du sieur de
Latour, commandant en la dicte le service desamaiesté, contenant lestat des
fortiffications faictes en icelle aux despans des dicts habitans et autres
pièces attachées à la dicte requeste, signée Aulhier et Loride. Ouy le rapport
et tout considéré. Le Roy en son conseil a deschargé et descharge les dicts habitans
de la dicte ville de Nontron de la moictié, à quoy ils seront imposez de
tailles pendant les années 1634 et 16135 a la charge de paier le surplus sans
nouvellement. A ordonné et ordonne que la dicte somme de dix mil cinq cens
livres sera imposée et levée sur les contributions des tailles de la dicte
eslection de Périgueux en trois années esgallement, à commencer en la présente,
nonobstant les deffences portées par les commissions des tailles, auxquelles sa
maiesté a desrogé pour ce regard, pour estre la dicte somme reçeue par les
receveurs des tailles en exercice les dictes années et par eux payée aux dicts
sindiq et consuls de la dicte ville de Nontron sur leur emploi, pour leur tenir
lieu des despences par eux faictes pour le service de sa maiesté, et seront
pour les dicts despens arrest toutes lettres par nous dellivrées. Signé :
Séguier, Molé, Foucquet, Bordier. (Archives nationales, E. 264.)
Tels furent, du XIIe au XVIIe siècle, les
exploits de nos fortes générations d'autrefois, aux croyances profondes, à
l'âme virile et à la santé robuste. Puissions-nous être, toujours et malgré les
funestes effets d'une civilisation sceptique et énervante, à la hauteur de leur
patriotisme et de leur désintéressement!
R. de Laugardière.
(A
suivre.)
[1]
L'hôtel de
Moncheuil appartenait alors a la famille de Roux, ainsi qu'il résulte de
l'hommage suivant qui nons a été communiqué par M. de Roux de Bellliac, dont
nous aurons à reparler au chapitre du canton de Bussière-Badil :
« Alain Dalbret,
seigneur de Rioms, comte de Penthièvre et de Périgord, vicompte de Limoges et
seigneur Davesne, a nos amez et féaux le seneschal ou son lieutenant,
procureur, receveur et autres officiers de nostre vicompté de Limoges et
chastellenie de Nontron, salut, scavoir faisons que nostre homme, Aymard Roux,
comme mari et conjointe personne de noble femme Peironne de La Vergne, nous a
faict les foy et hommaige quil nous est et peut estre tenu faire, a cause de
son hostel noble de Montcheuil, assis
dedans nostre chastel de Nontron, de son repaire
noble de Montcheuil, assis en la paroisse de Sainct-Martial-de-Valette, de son
hostel noble appelé de La Salle, assis au bourg de Sainct-Front-la-Rivière, et
aussi de son hostel noble d'Aubignac et repaire dicelluy avec toutes les
appartenances et appendances quelconques et generallement de tout ce quil tient
de nous en nostre viscompte de Limoges, auxquels foy et homaiges et serment de
fidélité sous lauthorite et bon plaisir de nostre bien aime seigneur et père
monseigneur Jehan Dalbret , vicompte de Tartas, lavons reçu soubs nostre droict
et saulvuy. Si vous mandons et commandons par ces présentes a chascun de vous
sy comme a luy appartenant, que se pour et a cause de ses dicts foy et homaige
et serment de fidélité, a nous paravant non faicts aucune chose du dict Aymard
Roux, estre promise saisie arrestée ou empeschée en nostre main incontinent et
sans delay le luy mestre ou faire mestre a pleyne délivrance, et len faictes
jouyr et ce pleynement et paisiblement, car tel est nostre plaisir. Donne en
nostre chastel de Nontron, soubs le scel de mon dict seigneur et pere, en
labsence du nostre, le xxje jour dapvril lan mil quatre cent soixante quatre.
Ainsi signe sur le ply par monseigneur le compte et vicompte. - Martial
Dauvergne, secrétaire.
[2]
Nous croyons
devoir reproduire ici, comme explication de ce nom de rue des Chèvres accolé à
celui de l'ancienne rue Noire, la légende populaire que nous avons publiée en
1873 dans nos Notes
historiques sur le Nontronnais, à
l'occasion
de la prise de Nontron par les troupes de l'amiral Coligny :
«L'amiral
coligny campa, a l'est de cette ville, eur les terrains formant les jardins de
l'hospice actuel, et qui, depuis cette époque, furent désignés, dans divers
actes publics, sous le nom de terre de l'amiral. Il en repartit
bientôt, laissant Antoine de Larochefoucauld avec un bon corps de troupes pour
faire le siège de Nontron. A quelques jours de là, et par une sombre nuit, la
garnison, aidée par quelques habitants, sortit sans bruit afin de surprendre
l'ennemi. Ces braves menaient devant eux un certain nombre de chèvres
baillonnées et à la queue desquelles on avait attaché des étoupes imprégnées
d'huile. Puis, arrivés à une distance convenue, ils détachèrent les chèvres,
mirent le feu aux étoupes et lancèrent les pauvres bêtes, affolées de douleur,
sur le camp ennemi, où ils se précipitèrent eux-mêmes en criant, frappant et
tuant les hommes endormis. Les huguenots, surpris et à demi éveillés,
s'enfuirent d'abord et se replièrent en bon ordre sur le mamelon voisin,
au-dessous du cimetière actuel, où eut lieu un combat acharné qui ne finit
qu'au point du jour par la retraite volontaire des Nontronnais. C'est depuis
cette époque que ce mamelon a pris et conservé le nom de Mataguerre (grand combat),
et que la principale rue du fort, la rue Noire, a pris celui de rue des
Chèvres, ces animaux et plusieurs des combattants provenant de ce quartier. »
[3] Dans le bulletin SHAP, on trouve
le mot « archevêque » qui est bien évidemment une coquille (note
C.R.)
[4]
Au XIIIe
siècle, la famillle Chabrol possédait la seigneurie de Chalus et aussi, dans la
châtellenie de Nontron, le bourg et la terre de Saint Pardoux-la-Rivière, dont
il fut fait exception dans l'hommage rendu en 1213 à l'évêque d'Angoulême par
Guy, vicomte de Limoges, en ces termes : castrum de Nontronio cum toto honore, exceptis burgo, Castro et fedo aux Chabrors. - Le 3 des
calendes de juin 1267, Gérald Chabrol confirme à Guillaume Seguin la possession
de la viguerie de ce bourg : Geraldus Chabrol,
domicellus, dominvs sancti Pardulphi de Ripperia. - Les Chabrol
étaient alors seigneurs de Chalus, et, à une époque indéterminée, ils y avaient
fait construire un petit château-fort qui prit le nom de Chalus-Chabrol, et le
donna au groupe d'habitations qui s’établit à l’entour.
Quelques années après, et on ne sait à quel titre,
tous les biens de la famille Chabrol passèrent aux mains des vicomtes de
Limoges; car, pour récompenser Gérard de Maulmont de ses services, Marguerite
de Bourgogne lui donna une partie de la seigneurie de Chalus, et cette donation
fut confirmée par sa fille Marie et par Arthur de Bretagne, dans leur contrat
de mariage, passé en mars 1371, dans lequel contrat la mère donnait tous ses
biens, y compris Chalus-Chabrol, ne se réservant que la terre de St-Pardoux-la-nivière,
qu'avant de mourir, le 27 août 1290, elle employa, par testament, à la
fondation d'un couvent de femmes dans cette dernière localité.
Devenu
propriétaire d'une partie de la seigneurie de Chalus, Gérard de Maulmont y lit
construire un second château, non loin du premier et qui prit, ainsi que le
nouveau quartier, le nom de Chalus-Maulmont. Aussi voyons-nous, dans un mémoire
judiciaire de 1732 et à propos de titres de rente de 1406, 1426 et autres,
contre le comte de Bourbon-Dusset, seigneur de Chalus, que : « La terre de
Chalus était divisée en plusieurs corps de seigneurie : une partie portoit le
nom de Chalus-Chabrol, une autre étoit connue sous le nom de Chalus-Maulmont.
Chacune avait son chef-lieu particulier... »
[5]
Charles, par la grâce de Dieu, roi de France, a nos ames et
feaulx les generaulx conseillers par nous ordonnés sur le fait et gouvernement
de toutes nos finances, tant en Languedoil comme eu Languedoc, salut et
dilection , sçavoir faisons que, pour considération des pertes et domaiges que
nostre très cher et aine cousin le comte de Penthevrie a eues et soustenues
pour le fait des guerres, a l'occasion
desquelles ses terres et seigneuries sont moult destruites et de petite valeur
a icelui nostre cousin, qui sur ce nous a fait requérir pour ces causes et
autres a ce mouvant, et mesmernent pour lui aider a soustenir son estât, avons,
donne
et donnons de grâce spéciale par ces présentes tout ce que a quoi seront tanxes
et imposés a cause de nos tailles ses hommes et subgies demourans en ses terres
et seigneuries de la vicomte de Limoges et ressort dicelui jusques à quatre ans
prouchainement venant a compter de la date de ces présentes.... Donne a Chinon,
le vingt-huitième jour d'avril, l'an de grâce mil quatre cent quarante-six... »
« Collationné,
en 1779, à l'original qui est au trésor des chartes de Navarre, au château de
Pau, par le conseiller du roi, garde, dudit trésor. Signé : Descheux( ?).
» - Voir aux Archives des Basses-Pyrénées.
[6] Voici, à ce sujet, copie du traité
intervenu « après la réduction de la ville et cité de Nantes en
l'obéissance du roy, » et dans lequel il est question de la prise de Nontron en
1487. Nous en devons la communication à l'obligeance de
M. F. de Bellussière, de Périgueux :
« Extrait du traicte passe a Nantes au moys de mars
mil cccc quatre-vingts et dix entre le roy Charles VIII et le sire d'Albret
(pièce écrite sur parchemin et extraite des registres du Grand conseil du roy).
»….
Nous estant en
nre ville et cite de Bourdeaulx et envoyâmes devers luy, afin quil vinst devers
nous et luy fismes faire commandement de par nous sur grans peines quil eust
a deppartir sad. armée, et lors icelluy nre cousin Delbret sen partit dud.
Chasteljeloux et passa avec sad. armée les rivierres de Garonne et Dordogne et
aultres, et marcha oultre jusques au pays de Périgort, en une sienne ville
nommée Nontron, en intention de marcher plus avant et soy joindre avec feu nre
cousin le duc Françoys de Bretaigne, pour certaine alliance que nre d. frère
Dorleans et luy avoient a icelluy duc de Bretaigne. Mais nonobstant certaine
armée que envoyâmes contre et au devant de luy, il fut empesche tellement quil
fut par nos gens de guerre assiège en lad. ville de Nontron, en laquelle aucuns
nos lieuxten. et chiefs de guerre qui lors y estoient en nre armée receurent
icelluy nre cousin Delbret a certain traicte, accord et appointement par
lequel, entre autres choses, fut accorde et dit que icelluy nred. cousin
Delbret de lors eu avant nous servirait bien et loyaument, et renonça et se deppartit
de toutes alien et intelligences quil povoit avoir faites a quelconques princes
ou
seigneurs,
et promist quil viendroit devers nous touttes et quanteffoiz que luy manderions
et ferions scavoir. Lesquelles choses et tout le
contenu aud. traicte nred. cousin Delbret promit et jura garder et observer, et
depuis eusmes icelluy traicte pour agréable et fut par nous ratiffie et
confirme. Et de la
icelluy
nre cousin Delbret, au moyen du traicte sen retourna en sesd. terres et
seigneuries de Gascougnes et illecques fit sa demeure jusques environ la festes
de Toussains..., etc. »